La cave de Monsieur Labiche

lourcine-affichePendant le siège de Paris en 1870, Eugène Labiche dut abandonner sa maison. Seul son jardinier resta sur place pour éviter le pillage …
Mais, à son retour, il constata que sa cave était entièrement vide.

Le jardinier lui expliqua que les Prussiens avaient bu l’essentiel de ses flacons. Et il ajouta fièrement : « Mais rassurez vous, Monsieur, j’ai pris largement mon compte. Et à chaque bouteille ouverte, je me disais : ce sera çà de sauvé pour Monsieur Labiche« .

Cà ne cerf à rien de s’énerver, Monsieur Labiche.

En 1857, Eugène Labiche avait écrit « L’Affaire de la rue de Lourcine » : une pièce dans laquelle le bourgeois Lenglumé se réveille un beau matin avec un inconnu dans son lit, une « épouvantable gueule de bois » et le soupçon d’être mêlé à un crime.

Comme qui dirait : pris en flagrant débit.

Gueule de bois : un mot que les auteurs d’aujourd’hui banissent de leurs textes. Consensus mou oblige.

Parfum révolutionnaire

Marie-Antoinette par Mme Vigée-Lebrun
Marie-Antoinette par Mme Vigée-Lebrun

Jean-Louis Fargeon, descendant d’une lignée de parfumeurs fut le parfumeur attitré de la Reine Marie-Antoinette. Durant la révolution, il fut arrêté et jugé. Il fut un des rares, en pleine terreur, à sauver sa tête. C’était le 9 thermidor (jour de l’arrestation de Robespierre). Dans sa geôle, la veille de sa parution devant le tribunal révolutionnaire, il écrit un joli texte pour préparer sa défense. J’en ai extrait ces lignes :

« On m’accuse d’avoir servi les ci-devant nobles. J’ai fabriqué des parfums à leur usage, mais ils possédaient les goûts et les moyens qui faisaient d’eux ma clientèle naturelle. J’ai souffert de leur légèreté et de leur négligence à payer leurs dettes, qui m’ont conduit à la banqueroute. J’ai eu le plus grand mal à rétablir mes affaires. ..

Je suis un homme de science, adepte du progrès comme le fut mon père. Mes expériences, connaissances et inventions ont porté sur l’art subtil du parfum. … J’ai cherché et trouvé dans la nature ce qui pouvait, dans mes compositions, susciter les mouvements de l’âme et ressusciter des souvenirs enfouis. Qu’exige-t-on aujourd’hui de mon art ? Devais-je, pour prouver mon patriotisme, composer un parfum à partir de l’odeur du sang qui flotte autour de la guillotine?

Ah, que je cesse enfin de respirer la fétide senteur de ma cellule qui m’emprisonne plus étroitement encore que ses barreaux ! Tandis que je me morfonds dans cette misère, il arrive que, soudain, le doux parfum des jours enfuis me transporte dans les jardins et les salons d’un monde où fleurissait, rose parmi les lys, feu la reine de France. Oui, je l’avoue, je suis fier d’avoir su exalter en elle la femme, sans avoir été pour autant un esclave de la souveraine.

Quand surgit ce parfum du passé ma vie tout entière s’ordonne comme j’ordonnais mes compositions odorantes.

L’accord se plaque d’abord sur le mode majeur, avant de laisser échapper les notes de tête qui jaillissent, folles, vives, impatientes comme la Jeunesse. Les notes de cœur palpitent ensuite, douces, accomplies et vibrantes comme la pleine réalisation d’une personnalité Enfin, lourdes, persistantes et tenaces, résonnent les notes de fond, présentes dès la première envolée. Tel fut mon art et telle fut ma vie. Je saurai demain si elle doit m’être ôtée.»

C’est beau !
Je vous « adior »
Votre Mona

Jean-Louis Fargeon, parfumeur de Marie-Antoinette
de Elisabeth de Feydeau – Editions Perrin 2005

Partir en miction

1483294863_31613af84f_oLa bière a la réputation d’agir sur la vessie. Il suffit de se rendre dans une fête de la bière, notamment à Munich, pour comprendre que c’est tout à fait justifié.

Et pourtant c’est le vin qui semble avoir suscité les expressions les plus imagées relatives au phénomène.
« Pisse dru « , La pissotière de l’Impératrice » : nombre de vocables locaux en font cas. Le vin est-il velouté ? C’est « le petit Jésus qui vous pisse dans le gosier« . Dès l’antiquité, les poêtes comparaient les grands vins à l’urine des dieux.
L’acte peut introduire une notion d’urgence. Ainsi du Beaujolais : « sitôt fait, sitôt bu, sitôt pissé » ou bien « il doit être bu et pissé avant Pâques » pour les Muscadets.
Le vin blanc est connu pour « destouper » les tuyaux. Par exemple les asperges conjuguées avec un Muscat d’Alsace invitent à une visite régulière du petit coin. Huîtres et Gros Plants ont également des effets diurétiques manifestes.

Quant au « bourru », ce mi-vin, mi jus de fruits, chargé de levures et de sucres que l’on boit durant les vendanges avec des châtaignes, ses vertus gustatives et surtout purgatives vous privent du plaisir irremplaçable de croquer une dragée Fuca.

Ahhhrrr, Scheiße, ahrrr !!!!