Pas steak, mais pastèque

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Avec les premiers frimas, il peut paraître saugrenu d’évoquer un fruit symbole de l’été. Un fruit que l’on croque à pleines dents pour se rafraichir. Je veux parler de la pastèque. Et pourtant, des chercheurs texans se sont penchés sur les bienfaits de cette cucurbitacée et ont démontré que la citrulline, un acide aminé présent dans le fruit, aurait les mêmes propriétés que le Viagra. Elle favoriserait notamment la dilatation des vaisseaux sanguins, permettant ainsi l’érection.

Cependant, je ne dis pas que les personnes qui prennent la pilule bleue peuvent substituer leur traitement par une cure de pastèques.

En effet, pour obtenir l’équivalent d’un comprimé de Viagra, il faudrait ingérer au moins 2kg de pastèque et… ne pas oublier que c’est la peau qui contient le plus de citrulline. Mais le gros problème, c’est que quand vous mangez beaucoup de pastèque, vous passez plus de temps aux toilettes que dans votre chambre…

je prends les 4
je prends les 4

Pour ceux qui n’aiment pas la pastèque, notez que le melon et le concombre contiennent également de la citrulline mais en plus faible quantité, ce qui implique d’en consommer d’avantage…

Finissons sur une note d’espoir. Qui sait : dans quelques années, il est possible qu’une gélule à base de pastèque vienne sur le marché (humour facile, mais sponsorisé par Rungis) évincer le Viagra et ses effets secondaires.

Bon Mona, vous savez bien que j’ai pas besoin de vasodilatateur. Par contre, je boirai bien un coup, pas vous ? Allez, je vous sers un Haut Médoc : Château Lacour-Jacquet 2002. Ce vin rouge me donne une frite, je vous dis que çà. Pas vous ?

Portion magique

portion-vache-qui-ritMon chef Lépicurien en relisant mon billet, m’a simplement dit : « je ne m’intéresse qu’au fromage, au vrai ». Oh, qu’il est dur, le grand homme ! Mais enfin j’espère, cher lecteur, que vous, vous aimerez lire la saga de la Vache qui rit qui a partagé notre enfance.

Cette star du fromage fondu est née à la fin du XIXe siècle. Ce produit des fromageries Bel doit une partie de sa gloire à la vache dessinée par Benjamin Rabier en 1921. Ce même Rabier dessinera la Baleine Bleue que l’on trouve toujours sur les sachets de sel. Bravo l’artiste.

Mais savez-vous qu’il se vend chaque année plus de 2 milliards de portions, sans compter un milliard de mini-cubes ? exportée dans 86 pays. La recette varie selon les pays pour s’adapter au goût de chacun.

L’inventeur n’est pas Léon Bel, le fondateur des Fromageries Bel, mais le Suisse Gerber qui lance le gruyère fondu (appelé aussi fromage à tartiner). Celui-ci est une aubaine car il permet de recycler les meules de gruyère non conformes. La famille Graf importe le concept en France. L’un des trois frères Graf se fâche avec le reste de la famille et livre le secret de fabrication au concurrent Bel, qui pourra utiliser le terme « fromage fondu ».

Le 16 avril 1921 voit le dépôt de la célèbre marque La Vache qui rit. Ce n’est pas encore celle que nous connaissons aujourd’hui. C’est Léon Bel qui la dessine, en s’inspirant de l’étiquette duvache-qui-rit-grand camembert Saint-Hubert, réalisée par le dessinateur Benjamin Rabier dont il a fait connaissance quelques années plus tôt à la guerre. La boîte est en métal serti et contient un seul bloc de Vache qui rit. Léon Bel lance alors un appel d’offre et choisit le dessin proposé par Benjamin Rabier. Toutefois, Léon Bel demande à son imprimeur, Vercasson, d’ajouter des boucles d’oreilles. Le dessin revu est déposé en décembre 1923 sous la dénomination « La Vache rouge ». Léon Bel en déposera un autre sur fond de montagnes jurassiennes, en janvier 1924, sous la dénomination « La Vache qui rit ». Au fil des ans, elle connaît de nombreuses versions.

Il y a « La Vache » conditionnée en tube (un flop !), la « mini- Vache », la version métal ou carton, les portions ou celle d’un seul morceau (version Outre-Rhin)… Les déclinaisons sont nombreuses et font la joie des collectionneurs.

J’ai testé pour vous « La recette » :

Soupe à la Vache qui rit

Coupez 4 courgettes et 5 à 6 portions de Vache qui rit en dés. Faites fondre un peu de beurre dans une casserole, et faites revenir doucement les courgettes sans les colorer. Couvrez avec un bouillon de poulet (une tablette) et ajoutez le « fromage ». Mélangez bien pour le faire fondre. Couvrez et laissez cuire jusqu’à ce que les courgettes soient bien tendres. Passez au mixer et assaisonnez selon votre goût.

Mona pas bu une une grande bouteille avec çà. Lépicurien a considéré que ce serait du gâchis.

Thé-rapie

Il y a quelques jours Mona a publié sur ce blog un article fort in-théressant sur le thé. On y voit bien que si la légende a é-thé inve-thée, c’est pour sublimer la réali-thé.

acorde-penduMais en fouillant sur la toile, on trouve des trésors qui dépassent la fiction. Ainsi dans le Dictionnaire des Merveilles et Curiosités de la Nature et de l’Art (1853), Adolphe de Chesnel nous relate une expérience de sous-alimen-thés :

Parmi les expériences qui ont été faites pour apprécier les qualités nutritives de certaines substances, on cite la suivante : trois Anglais condamnés à être pendus obtinrent une sorte de grâce à la condition que l’un ne vivrait que de thé, l’autre que de café et le troisième que de chocolat. Celui qui ne vécut que de chocolat mourut au bout de huit mois; le condamné au café ne dépassa point deux ans et celui qui ne se nourrissait que de thé put aller jusqu’à la troisième année. L’homme qui ne se nourrissait que de chocolat était dans un état complet de décomposition; il était mangé par les vers et ses membres tombaient les uns après les autres. Le buveur de café était défiguré comme si le feu avait calciné tout son intérieur. Enfin, celui qui ne vécut que de thé était si maigre et avait le corps si diaphane, qu’en plaçant une chandelle derrière lui, on pouvait voir tout l’intérieur.

Mona, si un jour je suis condamné à ce genre de peine, je demanderai à être nourri uniquement de vin. Notez le bien. Tiens d’ailleurs, je vous propose un coup d’essai. On va dépuceler de ce pas une boutanche de Beaujolais, mais du vrai, du nourrissant : un Brouilly 2007 du Domaine Laurent Martray.

Quand la Reine est servie…

marie-leczinska-boucheeLa bouchée à la Reine est un des plats les plus traditionnels de la gastronomie française. Saviez vous qu’en mangeant ce plat, vous saluez la mémoire de la femme de Louis XV ? Fille du Roi de Pologne, Marie Leczinska (1703-1768) épousa le Roi de France en 1725. Ce dernier n’avait que quinze ans, et elle, vingt-deux. Ils furent très amoureux et, pour la première fois, la Cour vit deux tourtereaux fort épris. De ces amours, naquirent dix enfants, dont seulement deux garçons (de plus l’un décéda en bas âge). Devenue une mère dévouée, elle délaissa un peu le Roi.

Louis XV se lança dans une longue vie extraconjugale et eut des maîtresses jusqu’à la fin de sa vie. Les plus connues ont pour nom Madame de Pompadour et Madame du Barry.

Dans les écrits de l’époque, la Reine est toujours présentée comme une « bonne mangeuse ». Gourmande, elle demanda à son cuisinier de lui concocter des recettes pour réactiver son appétit coïtal et lui ramener son Royal Epoux…  Seule à table, elle fit réduire la taille du vol au vent, plat à partager, pour obtenir un plat pour une seule personne.

Ainsi arriva la bouchée à la Reine. Dans la recette du XVIIIème siècle, les croûtes feuilletées sont  garnies d’un salpicon[1] fait notamment de ris de veau, de crêtes, de rognons de coq, d’amourettes, d’animelles d’agneau, de truffes et d’olives vertes.

Un régime fort aphrodisiaque mais qui n’eut que peu d’effet sur le couple !

Mais le plat passa les diverses révolutions et reste un des mets préférés des Français.

Pour réussir de belles bouchées, reportez vous comme moi à cette recette. Ne faîtes pas comme certains qui remplacent les ris de veau par des rognons blancs : çà peut donner des boutons aux jeunes femmes comme moi.

Mona pas mangé de bouchée à la reine. Elle en a pas besoin. Et vous ?

[1] Préparation de volailles, abats, champignons… coupés en petits dés et servant à garnir les bouchées à la reine ou vol au vent.

Un cou décès


smolettTobias Smolett est un anglais qui fit voyage en France et en Italie au XVIII° siècle. Il décrit, chose rare pour l’époque, la nourriture du petit peuple. Trop souvent, nos ancêtres ne se nourrissaient que de bouillons de légumes et de pain. Et pour couronner le tout, le nombre de jours maigres les empêchaient d’y plonger le peu de morceaux de gras qu’ils conservaient précieusement.

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Tobias Smolett (1721-1771)

Pourtant, le bouillon de « chair et de volaille » passe pour le meilleur « restaurant » (au sens premier : nourriture qui restaure le plus son homme). N’imaginons pas que roboratif rime avec solide, pesant, grossier. Le restaurant peut être délicat et léger. Il est destiné, en priorité, aux affaiblis, aux convalescents, aux malades surtout. C’est la nourriture hospitalière par excellence.

A propos de bouillon, Smolett rapporte un souvenir pas piqué des hannetons que je reprends in extenso :

1672, 28 mai. Il y a la foule des grands jours sur la place Saint-Didier, à Avignon, pour assister à l’exécution du nommé Pierre du Fort. Tout annonce un beau spectacle : arrivé sur les lieux de son supplice, le criminel « donne toutes les marques d’un bon chrétien », fait ses adieux a ses amis, et prend le crucifix des mains du père Palasse. Puis il monte en haut de l’échelle de pendaison, et là, il baise le crucifix et en donne sa bénédiction à tout le peuple rassemblé. Le bourreau jette le condamné du haut de l’échelle. C’est alors que les choses se gâtent. L’échelle prévue est trop courte, le condamné se prend les pieds dans les barreaux, et le bourreau se démène vainement. Un bourreau maladroit devient barbare : le voilà qui saute sur les épaules du condamné, puis lui bourre l’estomac de coups de genou, aidé par son valet, par sa femme qui tire le criminel par les pieds en bas de la potence. Comme le supplice dure «plus d’un grand miserere », le public réagit et manifeste. Il retourne sa haine contre le bourreau et ses aides : huées, puis jets de pierres, enfin on se jette sur le bourreau, qu’on bat à mort et dont on traîne le corps jusqu’à l’université, à deux pas de là, on bat aussi à mort son valet. Quant au condamné, il devient l’objet de toutes les sollicitudes. On coupe la corde, on le dépend, on l’allonge sur un matelas lancé d’une fenêtre. Mais il est resté pendu longtemps, et on craint pour sa vie. Alors, «on demande à grands cris du vin pour le pendu, du bouillon avec de la chair même, quoique samedi ». (Le samedi est un jour maigre)

Le bouillon de viande fait son effet. Voilà l’homme requinqué, restauré, et finalement gracié. L’épisode offre l’occasion d’une belle méditation sur la versatilité des émotions que l’on peut observer à plus d’un spectacle d’exécution publique. Contentons-nous, ici, d’observer les merveilleux effets du bouillon de chair. Grâce à lui, le condamné à mort en a réchappé. Et personne ne s’en étonne :

« Le bouillon est un remède universel parmi le bon peuple de France pour qui ne saurait mourir après avoir avalé un bon bouillon. »

Bouillon, bouillon ? Pourquoi pas ? Mais avant, un coup de Beaujolais s’impose. Je vous propose, ma belle Mona, un Moulin à Vent d’Hubert Lapierre. Ce vin réconcilie avec le gamay des monts de Beaujeu.

De l’antigel dans le calbute

324162346_0001_HZBande (si j’ose dire) de petits canaillous, les articles sur les aphrodisiaques sont en tête du box-office de ce blog. Vous êtes fort nombreux à lire les précieux conseils que Lepicurien et moi-même vous prodiguons. Certes, je suis fière de participer à cette grande œuvre pour la paix des ménages. Mais je ne vous le cache pas : cela m’inquiète : êtes vous si nombreux à devoir recourir à des philtres pour trouver ou garder l’âme sœur ; êtes vous si nombreux à devoir utiliser des potions pour vous lancer dans un « concerto pour porte-jarretelles » ?

En tous cas, vous avez inondé ma boite mails de messages. Certains me remerciaient pour ma contribution sur la mandragore ; d’autres me suppliaient de leur trouver autre chose de plus fort.
Ok les gars, mais je ne suis ni « mesdeuxseins », ni chimiste de nuit… Mais comme je vous adore et que je ne veux pas vous laisser avec le bigoudi ramolli, j’ai cherché dans un grimoire [1] qui fut à l’index pendant fort longtemps, une méthode pour « raffermir votre pompe à plaisir ».

J’ai relevé (si j’ose dire) quelques recettes dans un livre au nom étrange : le Petit Albert [2].

Je vous souhaite bon courage pour réunir les ingrédients… Mais, vous m’avez dit que vous étiez prêt à n’importe quoi.
Ce jour, je vous livre les conseils avisés et surement infaillibles d’Albert pour réussir en amour.

petit-albert-chaussurePour draguer sans peine
Tirez de votre sang un vendredi du printemps ; mettez-le sécher au four dans un petit pot, comme est dit ci-dessus, avec les deux couillons d’un lièvre et le foie d’une colombe: réduisez le tout en poudre fine, et en faites avaler à la personne sur qui vous aurez quelque dessein, environ la quantité d’une demi-drachme; et si l’effet ne suit pas à la première fois, réitérez jusqu’à trois fois, et vous serez aimé.

Conseil 2
Ayez donc recours à l’herbe que l’on nomme ennula campana [3]. Il faut la cueillir à jeun la veille de la saint Jean au mois de juin avant soleil levé, la faire sécher, réduire en poudre avec de l’ambre gris; et l’ayant portée durant neuf jours sur votre cœur, vous tacherez d’en faire avaler à la personne dont vous désirez d’être aimé, et l’effet suivra. Le cœur d’hirondelle, de colombe, de passereau, mêlé avec le propre sang de la personne qui veut se faire aimer, a le même effet.

petit-albertPour que çà dure, dur
Il ne suffit pas à l’homme de se faire aimer de la femme passagèrement et pour une fois seulement; il faut que cela continue, et que l’amour soit indissoluble, et par ainsi il a besoin d’avoir des secrets pour engager la femme à ne point changer ou diminuer son amour. Vous prendrez donc à ce sujet la moelle que vous trouverez dans le pied gauche d’un loup, vous en ferez une espèce de  pommade avec de l’ambre gris et de la poudre de Chypre [4], vous porterez sur vous cette pommade, et vous la ferez flairer de temps en temps à la femme, qui vous aimera de plus en plus.

Conseil 2
Comme il se pourrait faire que la femme se dégouterait de l’homme s’il n’était robuste dans l’action de Vénus, il doit se précautionner non seulement par les bons aliments, mais encore par des secrets que les anciens et modernes rechercheurs des merveilles de la nature ont éprouvés. Il faut, disent-ils, composer un baume de la cendre de stellion [5], d’huile de mille-pertuis et de civette, et en oindre le grand doigt du pied gauche et les reins une heure avant que d’entrer au combat; et l’on en sortira avec honneur et satisfaction de sa partie.

Conseil 3
La pommade composée d’oing de jeune bouc, avec de l’ambre gris et de la civette, produit le même effet, si l’on en frotte le gland du membre viril ; car cela produit un chatouillement qui donne un merveilleux plaisir à la femme dans l’action du coït.

cadeau-pour-bavardesConseil 4
Si le mari trouve que sa femme soit de complexion froide, et ne se plaise au lit, qu’il lui fasse manger les couillons d’oie, et le ventre de lièvre, assaisonnés de fines épices, et de temps en temps des salades où il y ait beaucoup de roquette, de satyrion et de céleri avec vinaigre rosat.

N’hésitez pas à me faire connaître les résultats… Moi, rien qu’en lisant le dernier conseil, et bien, vous savez … : j’ai vomi.

Mona tend les membres du blog. Dur, dur…

T’as le bonjour d’Albert


[1] Livre composé de recettes de potions, de sorts et autres choses magiques.
[2]
Ecrit au XII° et publié quatre siècles plus tard, cet ouvrage sulfureux rencontra un gros succès.
[3]
Nom commun : Aunée (plante utilisée en pharmacie).
[4]
Poudre de riz qui s’employait au XVIIIe siècle pour poudrer les perruques.
[5]
Petit lézard

L’ivre : deux caisses

A l’heure où nos gouvernants diabolisent le nectar de Bacchus, il est bon et encourageant de lire ces lignes :

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Rubens : Venus, Cupidon et Bacchus

ENIVREZ-VOUS

Il faut être toujours ivre, tout est là ; c’est l’unique question. Pour ne pas sentir l’horrible fardeau du temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer sans trêve. Mais de quoi ? De vin, de poésie, ou de vertu à votre guise, mais enivrez-vous! Et si quelquefois, sur les marches d’un palais, sur l’herbe verte d’un fossé, vous vous réveillez, l’ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au vent, à la vague, à l’étoile, à l’oiseau, à l’horloge; à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est. Et le vent, la vague, l’étoile, l’oiseau, l’horloge, vous répondront, il est l’heure de s’enivrer ; pour ne pas être les esclaves martyrisés du temps, enivrez-vous, enivrez-vous sans cesse de vin, de poésie, de vertu, à votre guise.

Charles Baudelaire (In Les petits poèmes en prose)


« Ma petite Mona, débouchez donc sans tarder
Ce flacon qui a vécu trop longtemps allongé.
Versez ce divin breuvage dans nos deux calices
Et fuyez cette terre ingrate pour le pays des délices. »

Oh, merde, je fais des vers, il est de temps de boire. Allez vite sortez les verres, je fais péter un Mauzac 2007 de chez Bernard Plageoles, un vin aux arômes très riches, doté d’un merveilleux équilibre en bouche.

P.S : pour voir le tableau de Rubens, cliquez ici