Lépicurien me fait devenir Sèvres

Le fameux bleu de Sèvres (ou de chèvre ?)

Madame de Pompadour fut souvent l’inspiratrice de Louis XV notamment en matière d’arts. Ainsi elle lui fit acquérir la Manufacture de Sèvres. Son ambition était de percer le secret de la porcelaine dure fabriquée en Saxe. Dans « Bleu de Sèvres », Jean-Paul Desprat nous relate avec talent cette affaire d’espionnage qui amènera Sèvres au firmament. Bien sûr comme toujours dans les romans historiques, il faut accepter que les héros soient toujours au bon moment et bon endroit… mais c’est tellement bien documenté et le rythme si enlevé que l’on se laisse porter par l’auteur. Ce roman se lit comme un policier.

Je ne trahirais pas ce texte pour vous laisser le suspense. Aussi je me contenterai de parler très brièvement de Böttger. Ce jeune chimiste fut au service de l’Electeur de Dresde qui l’embaucha pour travailler au secret de la « teinture rouge », c’est-à-dire la transmutation de l’argent en or. La croyance des alchimistes était qu’en chauffant de l’argent à des températures dont personne n’avait eu la maîtrise jusque là, on parviendrait à le transmuer en or.

C’est au cours de ses recherches que Böttger eut l’idée d’utiliser une terre extrêmement réfractaire et de la mélanger à de l’albâtre, qui une fois fortement chauffée devint une céramique très dure….La Saxe eut le monopole de la « porcelaine dure » en Europe durant 60 ans.

Mona pas de Sèvres, mais elle mange du chèvre…. et vous ?

Je tire sur tout ce qui bouge

Les Bourbons ont tous été passionnés par la chasse. Louis XIII avait fait construire un pavillon de chasse à quelques lieues du Louvre pour pouvoir chasser le plus longtemps possible et pouvoir se reposer sans avoir la contrainte de rejoindre Paris. Son fils, le roi Soleil, le conservera précieusement en l’agrandissant sans cesse pour en faire le Château de Versailles.

Dès leur prime enfance, les princes étaient conditionnés. Ainsi un certain Barbier rapporte que le futur Louis XV, âgé de 6 ans, avait des divertissements peu habituels : dans une vaste salle, étaient réunis un millier de moineaux, au milieu desquels on lâchait les oiseaux de la fauconnerie : le sang, les plumes tombées à terre, les cris et l’effroi des moineaux, amusaient fort le jeune prince. Agé de 13 ans, il se rendit à la Muette avec une biche qu’il avait nourrie et élevée. Il décida de la tuer. Il l’a fit éloigner, il tira et la blessa. La biche revint vers lui ; il la fit remettre au loin, et tira une seconde fois et la tua.

Sur les registres de Versailles, on relève un nombre de plus de 100 cerfs tués, chaque année, par Louis XV.

Heureusement, semble dire le chroniqueur, à l’âge de 26 ans, il se mit en chasse d’un autre gibier : les femmes. Ce changement sauva la vie à nombre de cervidés…

Mais ironie de l’histoire, on retrouve des cerfs au milieu des femmes. Madame de Pompadour, maîtresse du Roi, ayant cessé toute relation physique après quelques années, souhaitait conserver son rôle de favorite. Pour combler cette absence, fut créé avec sa complicité, le « Parc aux Cerfs« . Cette demeure toute proche du château était le logement d’un véritable harem à disposition du Roi… C’est là que Louis XV s’enticha de la du Barry.

Enfin, le 10 mai 1774 dans sa 64e année, après un règne de cinquante-neuf ans, Louis XV ne mourut pas d’un accident de chasse, mais de la petite vérole.

Pour accompagner un filet de biche, Mona, je vous propose un Cornas 2000 de Thierry Allemand. Un vin alliant puissance retenue et finesse. Chapeau bas…

La coupe est pleine de Poisson

Au sein d'une fabrique de coupes

Au début du XIX° siècle, on découvre la flute à Champagne :
« Nous ne pouvons passer ici sous silence l’heureuse innovation que ce convive aimable vient d’introduire dans la philosophie du couvert. Certaines personnes préfèrent le vin mousseux de Champagne à celui qui ne l’est pas : elles pourront boire dorénavant le premier dans des verres de dix-huit pouces de hauteur, dont la capacité favorise l’abondance de la mousse, sans offrir au palais une quantité rebutante de liquide réel. »

C’est sous la Régence que le Champagne est devenu le vin de fête que l’on connaît. Les diners fins exigeaient des mets aphrodisiaques : huîtres, truffes et Champagne… Pour ce on utilisait des coupes qui sont restées en usage dans nos familles jusqu’à ces dernières années. Si la coupe est délaissée aujourd’hui, c’est parce que sa forme évasée conserve mal l’arôme et les bulles, et le vin s’y évente rapidement. La mousse s’y forme mal et ne tient pas, le bouquet se disperse.

On dit que cette coupe fut moulée sur le sein de la Pompadour. La maîtresse de Louis XV était connue comme grande amatrice de champagne. N’aurait-elle pas dit que le « Champagne est le seul vin qui laisse la femme belle après qu’elle l’ait bu. »

Alors, Mona, si la coupe a été moulée sur le sein de Jeanne-Antoinette Poisson, épouse Le Normant d’Étiolles, marquise de Pompadour, pouvez vous me dire sur qui a été moulé la flute ?

Prenez votre temps, réfléchissez… en attendant buvons une flute de Champagne. J’ai retenu le Clos des Goisses 1999 élaboré par la maison Philipponnat. Un vin très puissant et peu dosé.

Dernières coupes moulées artisanalement

Asperges à la Pompadour

pompadourEt c’est quoi des asperges à la Pompadour ? Le patron, homme de culture (d’asperges ?) oublie que nous n’avons pas tous la chance de tout savoir comme lui. Heureusement, vous avez votre petite Mona…

C’est dans le Grand Dictionnaire de la Cuisine d’ Alexandre Dumas que je vous ai trouvé la recette originale :

Monsieur de Jarente, ministre d’Etat pendant la faveur de Mme de Pompadour, a laissé à notre célèbre gourmand Grimod de la Reynière, digne neveu de son oncle, la prescription suivante :

« Choisissez trois bottes des plus belles asperges du gros plant de Hollande, c’est-à-dire blanches avec le bout violet.
Faites parer, laver et cuire en les plongeant comme à l’ordinaire, c’est-à-dire dans de l’eau bouillante; tranchez-les ensuite en les coupant en biais du côté de la pointe, à la longueur du petit doigt. Ne vous occupez que des morceaux de choix, et laissez de côté le reste de leurs tiges.
Mettez cesdits morceaux dans une serviette chaude afin de les égoutter en les maintenant chaudement, pendant que vous confectionnerez leur sauce.

Videz un moyen pot de beurre de Vanvres ou de la Prévalais, en prenant le contenu par cuillerées et le mettant dans une casserole d’argent; joignez-y quelques grains de sel avec une forte pincée de macis en poudre, une forte cuillerée de fleur de farine d’épeautre, et de plus, deux jaunes d’œufs frais bien délayés avec quatre cuillerées de suc de verjus muscat.
Faites cuire ladite sauce au bain-marie, en évitant de l’alourdir en lui laissant prendre trop d’épaisseur; mettez vos morceaux d’asperges tranchés dans ladite sauce, et servez le tout ensemble, en casserole couverte et en extra, pour que cet excellent entremets ne languisse point sur la table et puisse être apprécié dans toute sa perfection. »

Mona sparagus