L’esprit dès l’oie

confit-oieAu début du XVIII° siècle, existaient à Bordeaux deux académies réunissant les personnalités des arts et des lettres les plus connues et les plus reconnues. Ces notables se réunissaient, les uns, dans une auberge des environs où l’on préparait d’excellents escargots, les autres, chez un restaurateur célèbre pour les cuisses d’oie qu’on y servait. Le petit peuple se moquait de ces réunions à la fois doctes et gourmandes et avait baptisé la seconde de ces compagnies “l’académie de l’austi roustit” (l’oie rôtie). De cette dernière, devait naître l’Académie des sciences, belles lettres et art de Bordeaux dont Montesquieu fut l’un des membres les plus respectés

Fumisterie

montesquieu-21Montesquieu, Seigneur de La Brède, propriétaire et vigneron avisé, assurait lui-même la promotion de ses vins et défendait auprès du roi la liberté de planter pour les viticulteurs. Jean-Vincent Coussié, propriétaire du Château La Blancherie à la Brède, lui a consacré un livre étonnant[1] qui nous fait découvrir un Montesquieu fort mal connu.

Un jour, par un très grand froid, il vit un de ses employés assis dehors sur son banc. Montesquieu s’approcha et lui demanda :
– Mais que fais-tu là dehors par un si grand froid ?
– C’est que, Monsieur le Baron, il y a la cheminée qui fume, répondit l’employé.
Montesquieu, voulant s’en assurer, entrouvrit la porte ; aussitôt, il entendit une voix de femme en furie qui hurla :
– Dehors vilain, je ne veux pas te voir, si tu rentres, tu as du balai, dehors…
Alors Montesquieu referma la porte et regardant son ouvrier lui dit :
– Mon pauvre ami, j’ai souvent vu fumer des cheminées mais je n’en avais jamais encore entendu qui fasse autant de bruit…

Au bureau, avec mon patron, L’épicurien, nous avons un rituel : quand il me demande si je fume après l’amour, je lui réponds que je n’ai jamais regardé. Cà le fait toujours rire.

Mona


[1] Montesquieu Une Pensée Politique Etonnamment Moderne de Coussié Jean-Vincent – Chez L’auteur – 1992

Fourchette et fraise

henry_iii_of_france_and_the_princess_margart_of_lorraineSelon certaines sources, c’est le roi Henri III qui la ramena de Venise, en 1574, selon d’autres, c’est sa mère, Catherine de Médicis qui l’avait apportée de Florence dans ses bagages.  Ce qui est certain, c’est qu’elle ne s’imposa pas vite dans notre pays. Seuls les Grands l’utilisaient et encore uniquement pour piquer l’aliment et… l’attraper avec les doigts pour le porter en bouche ! La Fraise, ce tour de cou de dentelle, devenant de plus en plus encombrant, l’on passa le morceau directement du plat à la bouche, via la fourchette, pour contourner l’obstacle…

Cela devenait urgent. Examinant l’imposante fraise et le pourpoint d’un courtisan, un marquis lui déclara :

– « Vous avez mangé du ragoût au dîner ! « 

– « Vous vous trompez, c’était pour souper… et c’était, il y a bien quinze jours ! « 

Les dimensions de la fraise subirent une telle inflation que les serviettes, bien que de taille respectable, ne tenaient guère autour du cou…

Il nous en est resté l’expression : « Avoir des difficultés à joindre les deux bouts ! « 

A la Saint Glin-Glin

Un saint vraiment cloche

Le prêteur et sa femme de Quentin Mtsys 1514
Le prêteur et sa femme de Quentin Metsys (1514)


Dans les temps anciens, il était usuel de ne régler son apothicaire, son tailleur, son bottier ou son perruquier qu’une fois l’an :  le jour de fête carillonnée du saint patron de leur corporation, les fournisseurs venaient présenter leur « mémoire » (le relevé de leurs factures de l’année).

« Être payé à la saint-glinglin », c’était donc ne jamais recevoir son dû car les cloches ne sonnaient jamais en l’honneur de ce saint imaginaire. Son nom joue sur l’homonymie entre « saint » et « seing », signal, son de cloche, renforcé par l’onomatopée « gling-gling » ( qui trouve son origine avec le verbe allemand « klingen »  qui veut dire « sonner »).

Heureusement, mon patron est honnête et même si ce n’est pas un saint : ma paie arrive chaque mois sur mon compte. C’est bon de ne pas être prise pour une cloche !


Ponte du jour

napoleon_apres-bataille-waterloo-flameng_francoisAu col du Pin-Bouchain[1], à une trentaine de kilomètres de Roanne, était établie l’auberge du Perroquet. C’est là que Napoléon s’arrêta un jour et y demanda deux œufs. Ayant mangé, il demanda le prix. Surpris par le montant anormalement élevé de l’addition, il s’adressa à l’aubergiste :

– Les œufs sont t-ils si rares dans la région qu’ils fassent l’objet d’une telle note ?

– Ce ne sont pas les œufs qui sont rares, Majesté, répondit l’homme, ce sont les Empereurs.


[1] Pin Bouchain est un col, situé à la limite des départements du Rhône et de la Loire. Considéré très dangereux encore de nos jours, Madame de Sévigné écrivait à son sujet : « Cette montagne qu’on ne passe jamais qu’entre deux soleils« .

En deux coups de cuiller à pot

suppeLa cuiller à pot était une sorte de louche à manche court perpendiculaire au cuilleron. Elle servait à verser le bouillon.

Deux ou trois coups suffisaient pour remplir rapidement une écuelle de potage; ou une gamelle de bagnard ou de militaire, car l’expression attestée en 1920 semble avoir été employée à l’origine dans ces milieux.

Certains ne se satisferont pas de cette explication. Ils voudront voir dans la cuiller à pot, celle des typographes ou le sabre d’abordage à coquille des marins. Hypothèse qui ne s’appuie sur aucun texte. Pour la petite histoire, retenons celle du futur Henri IV, annonçant à ses officiers : “La Reine Margot nous a donné un prince, en trois coups de cul, hier à Pau”

Extrait de Bernard Galey “Du coq à l’âne” –  Editions Tallandier

Et tutti chianti

chianti-classico-08Les bouteilles de vin de l’appellation « Chianti Classico » ont sur leur collerette un Coq Noir (Gallo Nero). Il est devenu pour l’appellation, un symbole et une garantie de qualité.

Une légende tente d’expliquer l’origine de ce fier gallinacé sur les bouteilles de Chianti Classico. Ce signe identitaire serait lié à la rivalité qui a toujours existé entre Sienne et Florence et ce particulièrement à l’époque médiévale. Afin d’en finir avec leurs guerres interminables, les deux cités toscanes décidèrent de s’en remettre à une compétition inhabituelle pour définir leur frontière : la délimitation entre les deux républiques serait fixée au point de rencontre de deux cavaliers partant de leur ville respective au chant du coq. Un émissaire de chaque cité fut nommé pour s’assurer que  les cavaliers partiraient bien au signal convenu. Les Siennois choisirent un coq blanc bien dodu pour manifester la richesse de leur cité. Les Florentins, quant à fiasquechiantisorsola-2003eux, choisirent un coq noir auquel ils donnèrent si peu à manger pendant plusieurs jours, qu’il chanta bien avant le lever du soleil. Ainsi le cavalier florentin se mit en route très tôt et rencontra l’autre cavalier à quelques dizaines de kilomètres de Sienne. Pratiquement toute la zone de Chianti Classico passa, à dater de ce jour, sous la juridiction de Florence.

Pour la légende, vous n’êtes pas obligés d’y croire. Par contre, pour le coq, retenez que pour apprécier un vrai et bon Chianti, mieux choisir la bouteille sobre avec un coq  noir plutôt que la « fiasque » toute habillée d’osier qui trône dans nombre de pizzerias. Si vous avez le choix, goûtez un « Chianti Classico Riserva » qui aura été élevé au moins 24 mois. Vous pourrez le servir avec un rognon de veau, un pigeon aux épices ou des lasagnes à la toscane…  Buono appetito

A Balthus

Aux Etats Unis, la pudibonderie est quelques fois poussée à l’extrême : vous savez surement que chaque année, le Château Mouton Rothschild (1er Cru de Pauillac) invite un artiste à peindre l’étiquette qui ornera chaque flacon. Pour le millésime 1993, la Baronne demanda à Balthus de réaliser une oeuvre. L’étiquette représente une adolescente nue, un de ces archétypes angéliques que l’artiste reprend dans nombre de toiles. Les « ligues de vertu » si puissantes de l’autre coté de l’Atlantique ont obtenu de retirer la vignette, objet de scandale à leurs yeux.

Aussi, sur ce millésime, deux étiquettes existent :  celle réalisée par Balthus et une étiquette sans peinture.

« Cachez ce vin que je ne saurais boire ». Les enfants de Tartuffe ont-ils émigré ?chateau_mouton_rothschild_1993mouton93usa

Un célèbre m’as tu bu

churchill_ottWinston Churchill, solide bon vivant, a eu le même médecin : Lord Moran, de 1940 à sa mort,  en 1965, à l’âge de 90 ans. Un journaliste demanda un jour au docteur du célèbre Premier Ministre :

– « Quel est votre rôle auprès de votre illustre patient ? »
– « Hé bien,
répondit le médecin, plusieurs fois par semaine, nous mangeons ensemble et je surveille son régime. »
– « Cela consiste en quoi ? »
– « C’est très simple, quand il reprend d’un plat ou d’un vin… j’en reprends aussi !

******

pol-roger-winstonWinston Churchill affectionnait particulièrement le Champagne et le Whisky. Un jour qu’il arriva éméché à une conférence de presse, une journaliste s’offusqua :

« Monsieur le 1er ministre, c’est une honte de vous présenter dans cet état devant vos concitoyens ».
Ce à quoi il répondit :
– « Oui, mais moi, Madame, demain je me lèverai et j’aurai dessaoulé, alors que vous, vous serez toujours aussi moche ! »

A une question d’une autre journaliste, lui demandant le secret de sa bonne forme :
« Le sport, Madame, JAMAIS de sport !« 

Et pour finir en beauté :
« Après la guerre, deux choix s’offraient à moi : finir ma vie comme député, ou la finir comme alcoolique. Je remercie Dieu d’avoir si bien guidé mon choix : je ne suis plus député ! »

********

Un médecin voulait supprimer le vin à un de ses patients…

« Pourtant, Docteur, si vous saviez comme le vin me donne du courage et de la force… Tenez par exemple, je me suis fait livrer un barriquot, il y a 15 jours. J’étais si faible que je le déplaçais avec difficulté. Depuis hier, je le porte à bout de bras !

Pur février

auguste2

Nous sommes le dernier jour du mois, or nous ne sommes que le samedi 28 … Le mois de FEVRIER vient de l’ancien calendrier romain. Il dérive du verbe latin februare qui signifie “purifier”, car pour les Romains, c’était le mois des purifications rituelles. Jusqu’à l’Empereur Auguste, février comptait 29 jours les années ordinaires et 30 jours les années bissextiles. Mais quand il fut décidé, pour honorer Auguste, de donner son nom au mois d’août, jugé le plus beau, on s’aperçut que ce mois ne comptait que 30 jours, alors que juillet, ainsi nommé en l’honneur de Jules César -dit Julius – en avait 31. Une telle situation fut jugée intolérable. Pour rendre Auguste égal à Jules, on enleva définitivement un de ses jours au petit mois de février pour le donner au mois d’août.

Février se retrouva réduit à 28 jours (29 en année bissextile)… ce qui réduisit encore un peu le temps des purifications.

Comme disait une copine : « En février, j’évite l’abus« .