C’est mon Jules

Quel lien entre « avoir un Jules » et Marie-Antoinette ?

C’est connu, la jeune Reine a beaucoup de mal avec l’étiquette versaillaise. Madame de Polignac lui est présentée en 1775. Jeune, élégante et gaie, Yolande plaît immédiatement à Marie-Antoinette. Elle apprécie sa légèreté et son insouciance.

polignacyolandePar une belle journée du printemps 1775, dans les jardins de Versailles, Yolande rieuse et charmante au milieu d’un groupe de jeunes gens s’adonne au jeu de barre, quand le destin mène la Reine en ces lieux. S’il faut en croire la comtesse de La Tour-Landorthe, Marie-Antoinette, après avoir d’abord observé le groupe à l’écart, s’approche de Yolande. « Frappée par cette figure angélique, par sa grâce et son air de simplicité, la Reine s’informe de son nom. Alors elle lui parle pour lui reprocher de se montrer rarement à Versailles, en l’engageant à y venir plus souvent, qu’elle la verrait avec plaisir. » Yolande répond sans ambages que son bonheur serait de voir chaque jour sa souveraine, mais la fortune de sa famille ne le lui permet pas. La simplicité de la comtesse séduit la Reine et lui paraît une franchise piquante. Plusieurs fois déjà, Marie-Antoinette a cru trouver l’amitié à laquelle elle aspire tellement. La princesse de Lamballe surtout, dont toute la Cour connaît les malheurs, avait su toucher son cœur compatissant. Mais le lien se distend déjà, sans incident ni rupture, et l’amitié de la Reine pour Mme de Lamballe tiédit un peu plus chaque jour.

Extrait de : Madame de Polignac et Marie-Antoinette par Nathalie Colas des Francs

Elles sont vite inséparables et Yolande devient duchesse et obtient la charge très enviée de Gouvernante des Enfants de France.

C’en est trop. Critiques, ragots pleuvent sur les deux femmes. On leur prêta des relations qui dépassent largement le cadre de la simple amitié. On qualifie Madame de Polignac de « Jules de la Reine ». En effet, elle était la femme du Comte « Jules » de Polignac.

Dès les premiers jours de la Révolution de 1789, la tête de la duchesse est mise à prix. Et pourtant, elle mourra, dans son lit, âgée de 44 ans, à Vienne le 9 décembre 1793 (Marie-Antoinette avait été guillotinée le 16 octobre de la même année). Sur sa tombe, on grava cette épitaphe : « Morte de douleur ». Quant à la Princesse de Lamballe, elle sera massacrée en septembre 1792. « Un sabre s’abat sur son cou. Elle est percée de plusieurs coups de piques. On la dévêt entièrement. Elle reste ainsi deux heures, étalée nue au coin d’une borne, à la risée lubrique de la foule. Un peu plus tard, on lui coupe la tête, on lui arrache le cœur. »

De tout cela, il reste cette expression « avoir un jules », c’est à dire avoir un amoureux…

Mona pas de jules, et vous ?

Mieux vaut en lire

Comme 90% des français, je lis dans le petit coin qui est l’endroit le plus tranquille de la maison : là loin des cris d’enfants, des remarques incessantes de la belle-mère, de la suractivité du matin, chacun peut s’adonner à la lecture.
Chacun a ses petites habitudes : l’un y amène son journal, un autre une BD, un autre un roman. Moi, je lis chaque matin le Dictionnaire Historique de la Langue Française. C’est un joli pavé en trois tomes dirigé par Alain Rey. Je trouve l’ouvrage parfaitement adapté au lieu. Les articles sont généralement courts, on n’est pas tenu de lire en suivant ; et chaque tome est suffisamment petit par la taille, peu lourd et se manie avec aisance (si j’ose dire).

lecture-wc

Et c’est fou ce que l’on apprend comme chose dans ces livres. Pendant que j’allège mes entrailles, je remplis ma cervelle. Rien ne se perd…

Ainsi ce matin, j’ai pu étudier la « pipe »…
Nom féminin issu du verbe piper (pipare : piauler, glousser) qui signifiait, vers 1180, pousser un petit cri pour un oiseau, ce sens reste dans certains termes de chasse pour imiter un cri d’oiseau que l’on veut attirer.
Un glissement s’opère au XVII° siècle : parler en phrases négatives; il nous reste « ne pas piper mot. »
Du langage des chasseurs, le mot a été repris par les joueurs : « les dés étaient pipés. »
Au XII° siècle, la pipe est un « tuyau, un goulot puis une futaille ou un contenant de liquide ». Au XVII° siècle, la pipe trouve enfin le fumeur… (puis la fumeuse ?)

Lépicurien en relisant cet article m’a suggéré de rajouter cette devinette qui l’a beaucoup fait rire :
Comment faire rire ses copains à la descente d’un avion ?
Montez à bord avec une pipe. Cet objet est encore autorisé. Lorsque l’avion est en vol, placez votre pipe sous votre siège et appelez l’hôtesse. Informez la que vous avez perdu quelque chose. Elle  vous aidera et trouvera sans mal ce que vous aviez posé.
Au moment de sortir de l’avion, lorsque le personnel vous salue, tournez vous vers votre hôtesse et dites suffisamment fort :
– Merci pour la pipe…

Mona fligée par l’humour de son chef… dur, dur

Mais elle sait répondre avec Jean Dujardin :

Plus pléonasme, tu meurs !

Pléonasme : Terme ou expression qui ne fait qu’ajouter une répétition à ce qui vient d’être énoncé. (Petit Robert)
Nous employons couramment nombre de pléonasmes : « Je l’ai vu de mes yeux, entendu de mes oreilles ; descendre en bas… »


aujourdhui

Mais le pompon des pléonasmes, c’est « au jour d’aujourd’hui ».
En effet le mot aujourd’hui (adverbe ou nom) est composé de « au jour » et « hui ». Or, ce vieux mot vient du latin hodie, ce qui signifie « le jour où l’on est ».
Donc en disant aujourd’hui, on emploie déjà un pléonasme. Alors inutile de rajouter au jour devant, çà fait beaucoup… çà revient à dire : au jour du jour de ce jour. Le temps de le dire et c’est déjà du passé…

Bon Mona, tout çà m’a donné mal à la tête et séché la menteuse. Maintenant qu’il est aujourd’hui, c’est surement actuellement le moment présent de boire un coup : le Bourgogne de J.C Regnaudot 2007 fera notre bonheur… du fruit, du fruit.

@@@@@@

arobase_body2Si vous lisez ce texte, c’est surement que vous possédez une adresse électronique (adresse mail). Or à l’intérieur de ladite adresse, se trouve un sigle que l’on nomme « arobase » ou « at » à la mode anglaise.
Et pourquoi ce sigle s’est-il introduit dans nos vies ? Ray Tomlinson, qui fut un des pionniers américains du réseau Internet, choisit ce symbole @ qui était présent sur les claviers de machine à écrire sans être beaucoup utilisé. Il était apparu à la demande des marchands hispanophones qui s’en servaient depuis le XVI° siècle. Il symbolisait une unité de mesure « l’arobe » qui pouvait différer d’une ville à l’autre.
Dans le Robert, il est précisé que l’arobe  (ou arrobe) est une mesure espagnole de poids (12 à 15 kg) et de capacité (10 à 16 litres). Le mot trouve son origine en arabe : ar-roub signifie « le quart ».

A propos de quart, je boirais bien un coup. Pas vous, Mona ? A la bonne heure. Un vin espagnol vous ferait plaisir ? Va pour un vin du domaine Pazo de Señorans (D.O Rias Baixas). Le cépage Albariño y donne un vin remarquable.

Pet des braves

La tirade du nez de Cyrano sent bon la France. Cette pièce d’Edmond Rostand est un hymne à ce pays qui est le mien. Quand un parolier s’empare de ces vers, il les tire du nez, pour les faire descendre plus bas. Et çà explose comme un feu d’artifesses.
Un grand merci à Christian Kaluc, l’auteur, qui m’a autorisé, avec ces quelques mots, à reproduire le texte que vous allez découvrir :
« Vous pouvez bien évidemment utiliser (comme vous le sentez) cette Tirade des Pets, qui n’a d’autres prétentions que de faire sourire, et de se venger personnellement contre les récitations à apprendre par coeur. Quoique cela permet de découvrir jeune des beaux textes que l’on apprécie plus tard, quand l’école de la vie vous a instruit davantage. »

LA TIRADE DES PETS

Un pet ! C’est un peu court, jeune homme !
On pouvait dire oh! Dieu! Bien des choses en somme.
En variant le ton, par exemple, tenez :
Agressif : « Moi, Monsieur, si je vous pète au nez
Il faudrait sur le champ que vous imploriez grâce. »
Amical : « Attention, que tu ne t’asphyxiasses,
J’ai abusé des racines jalap. »
Descriptif : « Pas en toc. Plus qu’un tic. Un handicap.
Que dis-je un handicap! C’est le fracas d’Hercule. »
Curieux : « Feriez vous exploser la capsule
D’un seul coup, Monsieur, vous dirais-je in petto. »
Gracieux : « Aimez-vous à ce point les fayots
Que paternellement, vous vous préoccupâtes
D’en remplir vos boyaux jusqu’à ce qu’ils éclatent ? »
Truculent : » Cà, Monsieur, lorsque vous dégazez
Les vapeurs de l’anus vous montent-elles au nez
Sans qu’un voisin n’appelle : SOS Asphyxié ? »
Prévenant : « Pétez donc, tout ce gaz renfermé
Car sans quoi vous allez décoller du sol ! »
Tendre : « Vous pourriez péter sous un parasol
Afin de soulager vos fesses
En procession à la grand messe,
Tel le curé, sous sa soutane. »
Pédant : « L’animal seul, Monsieur, qu’Aristophane
Appelle Hippocampemephantocamelos
Par un seul de ses pets, fait vibrer le cosmos. »
Cavalier : « Quoi, l’ami, le prout est à la mode ?
Gavez-vous de Soissons, c’est vraiment très commode. »
Emphatique : « Aucun vent ne peut, pet magistral
Te contrer tout entier, excepté le Mistra l! »
Dramatique : « Ah ! Que la campagne fut rude
Les éléphants avaient mauvaise haleine
On entendit l’infortunée Ségolène
Déclarer que la puante pétitude
L’agressait comme la teigne. »
Admiratif : « Pour un parfumeur, quel beigne ! »
Lyrique : « Votre anus ? Une conque, jouant sur tous les tons. »
Naïf : « J’en entends plusieurs, serait-ce un feuilleton ? »
Respectueux : « Souffrez, Monsieur, qu’on vous salue,
C’est là ce qui s’appelle chanter du trou du cul ! »
Campagnard : « He arde ! C’est-y-un pet ? Nanain !
C’est queuqu’navet géant, pas un haricot nain ! »
Militaire : « Pointez contre l’ennemi. »
Prophétique : « Je vous le dis en vérité,
Mes chères sœurs et mes chers frères,
Que celui qui n’a jamais pété
Vous jette la première pierre. »
Pratique : « C’est du gaz entièrement gratuit.
Récupéré, il peut servir de chauffage
D’appoint pour un petit ménage
Assurément, Monsieur, et c’est du plus écolo. »
Enfin parodiant Pyrame en un sanglot :
« Le voilà donc ce pet qui du nez de son maître
A détruit l’odorat! Il en rougit le traître !

Mona, je cherche un vin aromatique, bien entendu ; de la région de Bergerac, cela va sans dire. Nous allons nous régaler avec un vin rare : Château du Rooy 2008. La confidentielle appellation « Rosette » nous offre de bien agréables moelleux sur à peine plus de 10ha…

Transports peu communs

Au XIX° siècle, la patache était la diligence du pauvre. Mal bâchée, sans suspension, elle bringuebalait dans les chemins creux par tous les temps. Elle desservait les zones les plus reculées, les plus défavorisées du département. Le conducteur buvait fort et sec à chaque arrêt. Et Dieu sait qu’il y en avait des arrêts !
En fin de parcours, il laissait faire les chevaux qui connaissaient l’itinéraire et les étapes aussi bien que lui. Bien calé sur son siège, il restait à somnoler et à cuver jusqu’à ce que l’attelage le ramène à l’écurie… C’était « mener une vie de patachon ».

porteurs73La chaise à porteurs fut, à l’origine, d’usage privé, puis rapidement, en ville, s’instaura un système de service, ancêtre de nos taxis. Les bâtons étaient amovibles et servaient aux porteurs à se frayer un chemin à travers la cohue, à garantir la sécurité du passager et même, parfois, à le forcer à payer la course. A la sortie des tavernes, les litiges entre concurrents se réglaient à coups de bâtons. Cela n’était pas de tout repos : une « vie de bâtons de chaise ».

Ma chère Mona, je vous propose évidemment de déguster un Patache d’Aux. Je l’ai carafé, il y a une heure. Envoyez les verres.

Se rincer la dalle

femme-buvantAutrefois, la dalle était le bassin en pierre de réception des eaux, notre moderne évier… Légèrement en pente afin de faciliter l’écoulement, la dalle fut rapidement assimilée au gosier et à la charmante manière de l’humecter. En sortent quelques expressions imagées réservées au grands buveurs, du style : avoir la dalle en pente, se rincer la dalle ou se mouiller la dalle…

De même dans le Nord, « Avoir la dalle penchée », indique une forte propension à abuser de la boisson. A ma connaissance, nos amis bretons, pourtant grands buveurs, n’ont pas de locutions avec le mot dalle, curieux , non ?

Je cours de ce pas ajouter un additif à ma « convention obsèques ». J’hésite entre être incinérée pour m’offrir « une dernière cuite » et être enterrée pour profiter des derniers petits « vers ». Une chose est sure, en terre ou en urne, je demande à avoir la dalle en pente.

Mona vidé son verre comme les autres

Trinquons

convivialLa sympathique coutume d’entrechoquer les verres perdure surtout lors des fêtes familiales, noces, banquets et autres réunions de comices agricoles. La fragilité de nos verres de table nous incite à les lever en signe d’honneur plus qu’à trinquer. Au Moyen-âge ce n’était pas de discrets tintements, de cristallins tintinabulements : les lourds gobelets de métal se percutaient violemment avec projection d’une grande quantité de liquide. Les contenus des contenants s’entremêlaient, preuves qu’elles ne contenaient pas de poisons et que l’on était en confiance…
Valait-il mieux trinquer chez les Borgia que souper à la maison ?…  Pas sûr, l’empoisonnement se pratiquait surtout en famille ! !

Mona trinqué à votre santé. Tchin, tchin [1]


[1] Depuis 1935, formulation utilisée pour trinquer. Semble venir d’une salutation empruntée au pidgin de Canton : tsing, tsing.

Pas de quartier

9782203324060FSMonsieur Lépicurien, mon vénérable patron adoré m’a confié une belle mission : vous apporter un brin de culture. Il m’a dit « et pas de quartier » avec les lecteurs. Aussi, je me suis dit, tiens pourquoi ne pas commencer par cette expression :

Le quartier vient bien sûr du quart, et c’est avant tout la partie d’un tout divisé en quatre. Puis c’est devenu familièrement, dès la fin du XIIème siècle une partie, même inégale, de quelque chose. Dans les maisons bourgeoises, le quartier était une partie de l’habitation, réservée soit aux invités, soit aux domestiques.

On calcule l’ascendance des nobles en quartiers de noblesse. Puis vint celui de la ville et les gens qui y vivent. Le mot est très fréquent, depuis très longtemps, dans le langage militaire, où l’on prend ses quartiers d’hiver, où l’on est parfois cantonné, qu’il soit de cavalerie ou de dragons, où l’on décide, quand il est général (le Q.G.). Dès la fin du Xème siècle, c’est dans « La Chanson de Roland » qu’apparaît le « quartier de sauveté » : c’est, dans le château fort, la partie où l’on pouvait se réfugier, pour être en sécurité, après avoir abandonné la place aux assiégeants. Cela vient peut-être du vocabulaire de la chasse, le quartier étant le repaire où se cachait le sanglier que l’on traque. En tout cas, à l’époque, « demander quartier », c’était demander grâce. Si l’ennemi vous « donnait ou vous faisait quartier », on vous laissait la vie sauve. Quand on ne faisait « pas de quartier », à l’inverse, personne n’était épargné.

Autre source : cette expression dérive d’une convention conclue entre les Espagnols et les Hollandais qui permettait de faire payer une rançon à un officier ou soldat représentant une partie (un quartier) de sa solde. Quand au contraire, le vainqueur tuait l’ennemi, il signifiait au vaincu : rien ne sert de me proposer une partie de ta solde, il faut mourir.

Mona vre de paix, c’est vous

Boire la coupe jusqu’…au lit

ivre-mortL’abus de boisson provoque souvent un sommeil profond (aussi profond que le sommeil du juste ?). Dans certains coins de Bourgogne, on présente le début d’ivresse comme « prendre son lit en marche ».
Etre ivre tous les soirs, c’est « prendre son lit pour une tirelire », car régulièrement, on y met un « gros soûl dedans ».

Mona, versez donc un Muscadet … sur Lie…