Et Chouans sur la Mayenne

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Aujourd’hui six germinal l’an quatre (1796) de la République française, et par devant moy, Pierre Jolly, agent et membre du Conseil général de la commune de Thorigné, département de la Mayenne, élu pour rédiger les actes de naissance et mariage et décès des citoyens, a comparu Marie Renard veuve Dugué, demeurant aux Pins en cette commune, qui m’a déclaré que Perrine Dugué est décédée du deux dudit mois dans la grande lande de Chammes dans le chemin de Thorigné à Sainte-Suzanne, la dite comparaissante est âgée de cinquante ans, la dite décédée de dix huit ans. D’après cette déclaration, je me suis transporté sur le champ, je me suis assuré du décès de la dite Perrine et je dresse acte que la dite Marie Renard a déclaré ne savoir signer avec moi. La décédée est fille de Jean Dugué et de Marie Renard. Fait en la maison commune de Thorigné, le dit jour et mois et an ci-dessus.

Le cadavre de la jeune femme comportait de nombreuses blessures. Avait-elle été tuée par des Chouans, des bandits ? Nul témoin pour confirmer. Aussi en plein pays chouan, on fit de Perrine une sainte républicaine assassinée dans d’atroces souffrances. On raconta qu’une vieille femme qui aida à l’ensevelir, fut immédiatement guérie. On prétendit même que l’âme de la jeune martyre monta au ciel avec des ailes tricolores. Un culte se développa sous l’impulsion des prêtres constitutionnels. Ces derniers mal vus de la population très chrétienne espéraient attirer les foules grâce aux superstitions populaires. Infirmes et malades se rendaient à Sainte-Suzanne. On y construit une chapelle toujours debout bien que la dévotion à la sainte tricolore tomba rapidement dans l’oubli.

Chrétiens venez écouter
L’histoire de Perrine Dugué
Thorigné est son village
Agée de près de dix-sept ans
Cette belle fille sage
Est réduite au monument…

Aux Landes près de Blandouet
En chemin comme elle était
Allant à Sainte-Suzanne
Un fripon l’a arrêtée
Tout en lui cherchant chicane
Il voulait en abuser…

Elle, saisie de frayeur
Lui dit en versant des pleurs
Cœur perfide et cœur infâme
J’aime mieux cent fois mourir
Que de perdre ma pauvre âme
Consentant à ton désir…

Aussitôt ce scélérat
A grands coups l’a mise en bas
En lui fendant la cervelle
Comme un enragé brutal
Lui coupant une mamelle
L’écrasant de son cheval
La place où il l’a laissée
C’est où elle est enterrée

Dieu en a fait son Oracle
Pour montrer sa Sainteté
Elle fait souvent miracle
A qui va la visiter.
La priant dévotement
Elle obtient soulagement
A tous nos maux et misères
Prions Dieu sur son tombeau
Qu’il accepte nos prières
Par un prodige nouveau.

Ma chère Mona, ce texte est une complainte que l’on chantait en l’honneur de Perrine. Bon, Mona, un petit coup ? Ok ? Les Charmottes 2005 du Domaine Chauvenet-Chopin. Un Nuits-Saint-Georges subtil, fruité.

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