Pas de repetition

Pet des ménages

Si je vous parle de Saint-Evremond, vous aurez surement du mal à me citer ces œuvres. Il faut dire que cet écrivain n’a été publié qu’après sa mort. De plus, il passa quarante de sa vie en exil, mourut à Londres et est enterré à Westminster…

Mais je m’intéresserai plutôt au libertin qu’il fut. Il fut membre d’une confrérie gastronomique où l’on cultivait le goût le plus fin et le plus délicat, au point de ne vouloir manger que les perdrix d’Auvergne, du veau de Normandie, des lapins de la Roche-Guyon et des vins de Bourgogne. «M. de Saint-Evremond, dit Des Maizeaux, son ami éditeur et son biographe, se fit bien plus connaître par son raffinement sur la bonne chère que par l’attachement qu’il avait pour les dames.»

Le charme de sa conversation, son goût pour les plaisirs délicats et son esprit vif en firent un homme recherché. Mais curieusement, c’est ce même homme qui écrivit un poème dont le titre illustre le propos :

Sur un Pet qu’un Amant fit en présence de sa Maîtresse

Unique objet de mes désirs,
Philis, faut-il que mes plaisirs
Pour rien se changent en supplices
Et qu’au mépris de votre foi,
Un Pet efface les services
Que vous avez reçu de moi ?

Je sais bien, ô charmant objet,
Que vous avez quelque sujet
D’être pour moi toute de glace,

Et je confesse ingénument,
Puisque mon cul fait ma disgrâce
Qu’elle n’est pas sans fondement!

Si pourtant cet extrême amour
Dont j’eus des preuves chaque jour
Pour un Pet s’est changé en haine
Vous ne pouviez jamais songer
À rompre une si forte chaîne
Pour aucun sujet plus léger …

Mon cœur outré de déplaisirs,
Etait gros de tant de soupirs,
Voyant votre amour si farouche,
Que l’un d’eux se trouva réduit,
Ne pouvant sortir par ma bouche,
A chercher un autre conduit.

S’il est vrai qu’on ose nier
La porte à chaque prisonnier
Alors que la Princesse passe,
Ce Pet pouvait avec raison
Vous demander la même grâce,
Puisqu’il se voyait en prison.

S’il ne s’est pas fort bien conduit
Qu’il ait fait quelque peu de bruit
Lorsqu’il se fraya cette voie
C’est qu’il était si transporté
Qu’il fit en l’air un cri de joie
En recouvrant sa liberté !…

Hélas! Quand je viens à songer
À ce sujet faible et léger,
Qui cause mon malheur extrême,
Je m’écrie, en ma vive ardeur:
Fallait-il me mettre moi-même
Près de vous … en mauvaise odeur?

Si pour un Pet fait par hasard,
Votre cœur ou j’ai tant de part,
Pour jamais de moi se retire,
Voulez-vous que dorénavant
Vous me donniez sujet de dire
Que vous changez au moindre vent ?

Ne faîtes donc point d’autres choix;
Et puis que votre âme à mes lois
S’était soumise toute entière,
Soyez telle qu’auparavant,
Ou l’on dira que mon derrière
M’a fait perdre votre devant.

Cette flatulence n’eut heureusement pas de suite fâcheuse puisque Saint-Evremond rendit hommage, bien plus tard, à Philis par ces vers en apprenant sa mort.

Mona, j’ai entendu un bruit : ni un orage, ni un zéphyr, juste une petite brise. Ne me dites pas que … oh non pas vous ! Bon si vous avez des embarras gastriques, il faut un vin bien sec : Le Riesling Smaragd 2007 du Domaine Pichler est un vin phénoménal. Une finesse qui dure longtemps en bouche : le mariage d’une clémentine et d’une pierre. Décidemment, l’Autriche produit de très grands vins blancs ! 

Orage, ô désespoir…

En ce 1er juillet 1810, un temps orageux pèse sur Paris. C’est ce jour que l’ambassade d’Autriche a retenu pour fêter le mariage de Napoléon avec Marie-Louise. Plus de vingt têtes couronnées sont réunies et l’ambassade brille comme un des palais des Mille et une nuits. C’est une débauche de bougies qui éclaire convives et salons. Par moments, des coups de vents n’inquiètent pas assez les services de sécurité pour empêcher de tirer un magnifique feu d’artifice. Une fusée tombe sur une galerie provisoire : début d’incendie rapidement éteint sans que les invités ne remarquent quoi que ce soit.

Mais un coup de vent fait bouger un lustre qui se rapproche d’un rideau de mousseline qui s’enflamme. Rapidement le feu s’étend. Le couple impérial est évacué ainsi que les principales personnalités.

Pendant ce temps, les danseurs ne s’aperçoivent de rien jusqu’à ce que:

« Sur cette foule qui se bouscule, se presse, s’entasse, s’écrase, les bougies liquéfiées, la cire et le goudron enflammés, gouttent, tombent, brûlent les cheveux, les nuques, les épaules, les gorges et les bras nus, s’attachent aux habits brodés d’or, percent les légers tissus des robes… Les cordons qui supportent les lustres rongés par le feu, se rompent ; les lourdes masses de bronze en tombant renversent, blessent, écrasent ceux qui se trouvent en dessous, défoncent le parquet… et dans ces trous, dans les branches de métal, les gens trébuchent, s’empêtrent, se foulent aux pieds, se brûlent et se déchirent. »

Un grand nombre de volontaires du quartier participèrent aux secours. Des voleurs en profitèrent pour dévaliser tout ce qui semblait avoir de la valeur…

On ne connut pas le nombre exact de victimes mais le chiffre de 90 morts circula. La belle-sœur de l’ambassadeur, Pauline Charlotte d’Arenberg-Hohenfeld, princesse Joseph de Schwarzenberg, notamment fut retrouvée écrasée par une poutre. C’est grâce à ses bijoux (non volés) qu’elle fut identifiée.

Napoléon fut fortement affecté par ce drame. Pensait-il à la bousculade qui avait endeuillé le mariage de Louis XVI et de Marie-Antoinette. Les autrichiennes étaient-t-elles porte-malheurs pour les gouvernants de France ?

En 1811, l’Empereur ordonna la création d’un corps militaire de sapeurs du génie de la Garde impériale chargé d’assurer la sécurité incendie des palais impériaux qui deviendra rapidement le bataillon des sapeurs-pompiers de Paris chargé de prévenir les incendies dans la capitale.

Mona, rendons hommage à ce corps de sapeurs qui a rendu et rend toujours tant de services. Buvons à leur santé un vin du Liban. La cuvée 2008 du Château Musar est le second vin de ce domaine qui produit de très jolis vins. L’étiquette toute rouge brille comme un camion de pompiers !