Tout feu, tout femmes

En mars 1915, Jeanne Cuchet, 67 rue du Faubourg Saint-Denis (10ème) et son fils sont partis brusquement pour l’Angleterre, dit-on.

Le 27 mai 1915, Thérèse Laborde-Line, veuve de 46 ans, ne répond pas à son domicile au 29 rue de Patay (13ème).

Le 1er aout 1915, Marie-Angélique Guillin, 51 ans, quitte, sans laisser d’adresse, le 35 rue Crozatier (12ème). Son appartement est vidé quelques jours plus tard.

Le 25 décembre 1916, Anna Colomb, veuve, quitte son domicile au 15 rue Rodier (9ème) après avoir retirer son épargne bancaire.

En mars 1917, Andrée Babelay, 19 ans, part du 32 rue de Maubeuge (10ème) pour rejoindre un homme rencontré quelques jours plus tôt, grâce à une petite annonce.

Le 25 novembre 1917, on dit que Louise Jaume, bigote de la rue des Lyanes (20ème) est partie s’établir aux Etats-Unis.

En avril 1918, dans la même rue, Anne-Marie Pascal, veuve de 36 ans n’apparait plus. Est-elle aux Etats-Unis, elle aussi ?

Le 13 janvier 1919, Mademoiselle Mercadier, Mythèse pour les clients, domiciliée 330 rue Saint Jacques (5ème), va se promener avec ses trois chiens à la campagne pour quelques jours.

Le 12 avril 1919, au 76 rue Rochechouart (9ème) deux inspecteurs surprennent au lit, en galante compagnie, un ingénieur du nom de Lucien Guillet. La femme s’appelle Fernande Segret.

Bon, et alors ? Guillet a utilisé nombre d’identités : Freymiet, Morice, Forest de Bergnieux, Cuchet, Tartempion, Prunier, Baizieux… pour passer de petites annonces du genre :

« Monsieur sérieux, bonne situation, 47 ans, sans famille, désire épouser veuve, sans famille ou incomprise, situation en rapport, âge indifférent. »

Or la Grande Faucheuse profitait de la guerre de 14-18 pour faire des veuves à tour de bras. Et çà créait un marché pour un déserteur en mal d’argent.

Lucien Guillet était un petit escroc qui avait été condamné à 7 reprises. Marié, père de 4 enfants, il utilise les fonds prélevés aux dames qu’il rencontre pour alimenter le foyer familial. Quand aux dames, elles finissent dans la cuisinière de Gambais.

Ah, oui, j’ai oublié de vous dire que le vrai nom de Guillet était Henri Landru… « le Saigneur de Gambais, le défenseur de « la femme au foyer ».

Il sera exécuté le 25 février 1922 après avoir refusé le dernier verre et la dernière cigarette en disant : « c’est mauvais pour la santé ».

Bon Mona, c’est pas tout çà. On va boire un coup de crémant de Bourgogne au nom de circonstance : Veuve Ambal. Allez deux flutes, deux…

Le Pinard

Le Champagne, c’est du pinard à ressort (San Antonio)

Le pinard, çà devrait être obligatoire (Coluche)

J’ai comme toi pour me réconforter
Le quart de pinard
Qui met tant de différence entre nous et les Boches (Apollinaire)

Le+PinardL’origine la plus probable de ce vocable est une déformation de “pinot” le cépage roi de la Bourgogne et du Champagne. On l’utilise, dans le langage vulgaire, dés le XVIIème siècle. Il fut glorifié et personnifié pendant la guerre de 14/18 : le “ père pinard ”.
Une autre historiette court sur le mot. Au XIX° siècle, le docteur Adolphe Pinard (spécialiste en obstétrique) aurait travaillé pour l’armée. Sur ses conseils, on aurait complété les rations de vin avecdu mercure pour protéger les soldats contre les maladies honteuses !… Le bon docteur est mort en 1934 à 90 ans ! Il n’avait pas du consommer beaucoup de sa mixture pour parvenir à cet âge !
Il n’a jamais revendiqué un rôle quelconque dans l’heureuse issue de la grande guerre, pourtant la victoire est toujours revendiquée par beaucoup de pères. Seule la défaite est orpheline.

Durant cette Grande Guerre, on retrouve dans nombre de lettres de soldats des allusions au fameux picrate. Au sens propre, ce mot désigne le sel de l’acide picrique, utilisé dans la fabrication des explosifs. Dans les tranchées, le gros vin rouge qui « attaquait » et était destructeur fut ainsi nommé.

Bon Mona, si on faisait une petite rincette ; mais du bon, pas du genre Clinton[1] qui tache…si vous voyez ce que je veux dire.

[1] Cépage teinturier interdit en France depuis 1935 comme le sont les cinq autres du même groupe : le Noah, l’Herbemont, l’Isabelle, le Jacquez et l’Othello.