Le goût d’Evin

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Il y a 23 ans que la loi Evin a été votée. Vous savez cette loi qui se préoccupe de notre santé et nous détourne du tabac (on ne s’en plaindra pas) et des boissons alcoolisées. Et là, le bât blesse. En effet, l’intention du législateur était d’autoriser la publicité des vins (et non d’Evin) tout en limitant ses excès et en protégeant les jeunes. Seulement au fur et à mesure du temps, les tribunaux ont donné une interprétation de plus en plus restrictive de ce texte législatif et le vin, patrimoine national reconnu par tous les pays du monde est devenu boisson non grata chez nous. Résultat, en une vingtaine d’année, la consommation du jus de la treille a fortement baissé.

Sans revenir sur les chiffres d’une consommation excessive constatée au début du XX° siècle, il y a de quoi se poser des questions. Il ne reste qu’un peu plus de 15% de consommateurs quasi quotidiens de cette noble boisson. Moins de 50% ne boivent un coup qu’une fois par semaine voire moins et près de 40% ne boivent jamais de vin ou lors de rares occasions (mariage, fête de famille…). Si nous continuons à ce rythme, d’ici peu les abstinents seront plus nombreux que les buveurs. Pour le pays vu par les touristes comme le pays du bien boire, c’est fort de café.

Et comme le souligne le guide de la loi Evin, cette politique suicidaire est un échec sur toute la ligne. Le nombre de jeunes pratiquant le binge-drinking a explosé. Sur les réseaux sociaux, les concours d’ivresse rapides sont légion et ils n’utilisent pas des produits vinicoles de notre terroir mais plutôt des alcools saxons de mauvaise qualité éventuellement additionnées de bière. La France est devenue un très gros acheteur de whisky, vodka, gin…
Interdisant la présentation de vin dans les lycées, à la télé, les législateurs ont privé les jeunes de connaissance du vin. Ils n’ont aucune éducation et s’ils n’ont pas la chance de goûter du vin en famille, ils ne retiennent que l’alcool trop faible pour se bourrer au plus vite. Heureusement nos élus viennent de modifier ce texte. Il était temps !

Ma chère Mona, pour parfaire votre éducation que diriez-vous d’un Saint-Joseph rouge de Louis Chèze ? La Cuvée Caroline 2009 est une vraie gourmandise charpentée. Ce vin Bio sera à son affaire avec une jolie grillade.

La loi et vins

Je bois à la santé de tous les vignerons de France
Je bois à la santé de tous les vignerons de France

Y’en a marre. Ces derniers jours, une étude sur l’alcoolisation des enfants fait la une des médias. Et c’est vrai que savoir que les jeunes pratiquent régulièrement le speed-drinking ou binge-drinking et finissent en coma éthylique. Malheureusement, cette pratique qui consiste à se bourrer le plus vite possible est le signe d’un manque d’éducation. Sûrs qu’en étant né en France, on est un connaisseur inné de savoir manger et boire. Alors qu’au Canada, par exemple, le programme Educ’alcool informe et prévient des dangers de l’alcool. En Belgique, c’est Educalcool qui s’occupe des jeunes. En France, nous avons la loi Evin qui étonne tous les autres pays. Mélanger vin et alcool est une aberration. Quand tout Américain, Japonais rêve de l’art de vivre à la Française, nous ignorons notre patrimoine vini-viticole. Nos vignerons sont souvent des vedettes plus connus là-bas que chez nous. En France, pas grand chose, si ce n’est de la répression !

Pour revenir aux articles de ces derniers jours, j’ai relevé celui du Monde. On peut y lire : «Environ un collégien sur six et trois lycéens sur cinq reconnaît avoir été ivre. Le cidre, plébiscité par les collégiens, est rapidement remplacé par la bière et l’alcool fort au lycée».
Et l’illustration représente des verres de vin. Bizarre, non ! Pourquoi pas un verre de whisky, de vodka dont les ventes ont explosé de près de 50% en cinq ans quand la consommation de vin baisse chaque année en France.

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Bon, je vais pas tomber dans la sinistrose. Et pour ce, je laisse Georges Brassens chanter le vin :   

Avant de chanter
Ma vie, de fair’ des
Harangues
Dans ma gueul’ de bois
J’ai tourné sept fois
Ma langue
J’suis issu de gens
Qui étaient pas du genre sobre
On conte que j’eus
La tétée au jus
D’octobre…

Mes parents on dû
M’trouver au pied d’une souche
Et non dans un chou
Comm’ ces gens plus ou
Moins louches
En guise de sang
(O noblesse sans Pareille!)
Il coule en mon cœur
La chaude liqueur
D’la treille…

Quand on est un sage,
et qu’on a du savoir-boire
On se garde à vue
En cas de soif, une poire
Une poire ou deux
Mais en forme de
Bonbonne
Au ventre replet
Rempli du bon lait
D’l’automne…

Jadis, aux Enfers
Cert’s, il a souffert
Tantale
Quand l’eau refusa
D’arroser ses amygdales
Etre assoiffé d’eau
C’est triste, mais faut
Bien dire
Que, l’être de vin
C’est encore vingt
Fois pire…

Hélas ! il ne pleut
Jamais du gros bleu
Qui tache
Qu’ell’s donnent du vin
J’irai traire enfin
Les vaches
Que vienne le temps
Du vin coulant dans
La Seine !
Les gens, par milliers
Courront y noyer
Leur peine…

 Bon Mona, on est des adultes, on pourrait peut-être s’en faire un petit ? Hein? Allez, je vous propose un Viré Clessé 2007 des Bret Brothers. Un vin bio du Maconnais qui est une belle illustration des progrès réalisés dans la Bourgogne Sud. 

La cave se rebiffe

Le texte qui suit est tiré d’une revue professionnelle de 1913. Un médecin encourage à boire du vin pour éviter l’opération de l’appendicite. De nos jours, je ne suis pas certain que l’on puisse encore écrire cela sans s’attirer les foudres de la loi Evin.

Le vin va réapparaître sur nos tables et ce sera justice. Le réquisitoire du Docteur Gagey s’étaye sur des témoignages particulièrement impressionnants. Il nous cite plusieurs familles de sa clientèle où, seuls, les buveurs d’eau sont frappés et où ils le sont tous. Cette constatation lui ayant paru intéressante, il s’est informé auprès de quelques-uns de ses confrères et a recueilli d’eux des renseignements concordants.
Dans la région où il exerce, les amateurs de vin sont en très grande majorité, mais la proportion de ceux-ci dont l’appendice devient malade, est infime au regard de ce qui se passe  chez les dissidents qui le dédaignent ou le redoutent.Il est instructif aussi de remarquer avec lui que l’appendicite est devenue singulièrement fréquente depuis vingt-cinq ans, c’est-à-dire depuis la grande invasion phylloxérique[1] qui, raréfiant le vin naturel, favorisa la falsification, amena l’abandon de la boisson coutumière.On la rencontre aussi de préférence dans les classes où boire de l’eau est devenu une mode beaucoup, plus facilement que dans les milieux populaires, moins accessibles aux suggestions du snobisme et à ses exagérations hygiéniques.
Et c’est bien l’eau, l’eau seule, qu’il faudrait accuser et non des impuretés quelconques véhiculées par elle. Parmi les sujets qui ont attiré l’attention du Dr Gagey, une bonne partie s’abreuvait d’eaux minérales ou d’infusions chaudes. Ce sont là, par définition, des boissons où les microbes ne fréquentent guère. Aussi faut-il en arriver, comme explication, à celle que nous esquissions plus haut.

Mona, vous n’avez pas été opérée de l’appendicite. Bon alors, on va boire un coup pour éviter le bistouri…  Rien ne vaut le préventif. Par ces chaleurs, je vous invite à titiller une bouteille de Raisins Gaulois, un vin de table de Marcel Lapierre, un roi du Gamay…


[1] Phylloxera : insecte originaire des États-Unis a provoqué une grave crise du vignoble européen à partir de 1863.