Pas de quartier

9782203324060FSMonsieur Lépicurien, mon vénérable patron adoré m’a confié une belle mission : vous apporter un brin de culture. Il m’a dit « et pas de quartier » avec les lecteurs. Aussi, je me suis dit, tiens pourquoi ne pas commencer par cette expression :

Le quartier vient bien sûr du quart, et c’est avant tout la partie d’un tout divisé en quatre. Puis c’est devenu familièrement, dès la fin du XIIème siècle une partie, même inégale, de quelque chose. Dans les maisons bourgeoises, le quartier était une partie de l’habitation, réservée soit aux invités, soit aux domestiques.

On calcule l’ascendance des nobles en quartiers de noblesse. Puis vint celui de la ville et les gens qui y vivent. Le mot est très fréquent, depuis très longtemps, dans le langage militaire, où l’on prend ses quartiers d’hiver, où l’on est parfois cantonné, qu’il soit de cavalerie ou de dragons, où l’on décide, quand il est général (le Q.G.). Dès la fin du Xème siècle, c’est dans « La Chanson de Roland » qu’apparaît le « quartier de sauveté » : c’est, dans le château fort, la partie où l’on pouvait se réfugier, pour être en sécurité, après avoir abandonné la place aux assiégeants. Cela vient peut-être du vocabulaire de la chasse, le quartier étant le repaire où se cachait le sanglier que l’on traque. En tout cas, à l’époque, « demander quartier », c’était demander grâce. Si l’ennemi vous « donnait ou vous faisait quartier », on vous laissait la vie sauve. Quand on ne faisait « pas de quartier », à l’inverse, personne n’était épargné.

Autre source : cette expression dérive d’une convention conclue entre les Espagnols et les Hollandais qui permettait de faire payer une rançon à un officier ou soldat représentant une partie (un quartier) de sa solde. Quand au contraire, le vainqueur tuait l’ennemi, il signifiait au vaincu : rien ne sert de me proposer une partie de ta solde, il faut mourir.

Mona vre de paix, c’est vous

Du tact au tac

SergeGainsbourg2

La journaliste :
Serge, on vous prête un certain talent de guitariste. Pourtant, vous ne composez qu’au piano.»

Gainsbourg :
-« Vous avez déjà essayé de poser un cendrier et une bouteille de Scotch sur une guitare, vous ?

Mona, vous avez déjà essayé de poser deux verres et une bouteille de vin sur un bureau ?
Un Brouilly , très bien, Mona et …

…Suspends un violon, un jambon à ta porte
Et tu verras rappliquer les copains

Tous tes soucis que le diable les emporte
Jusqu’à demain

tache vin

Mona, vous avez renversé votre verre de Brouilly sur mon bureau... Dois je vous resservir ?


Centon

stylo-plumeNon, en écrivant « centon », je n’ai pas fait de fautes d’orthographe. Ayant le privilège d’être au service de Lépicurien depuis plusieurs années, je me suis toujours fait un point d’honneur d’éviter les fautes grossières. Non, bien sûr, je ne veux pas parler de ces petits bonhommes d’argiles qui habitent les crèches de Provence. Mais je reprends un vieux mot d’origine grecque que l’on pourrait traduire par un mot anglais « patchwork »[1].

Le « centon » est un jeu littéraire qui consiste à créer un poème original à partir de vers empruntés à d’autres auteurs. Je vous propose deux exemples :

LA LUNE AUX OLIVIERS

Ô cité douloureuse! Ô cité quasi morte !                                 1
La nuit s’épaississait ainsi qu’une cloison.                             2
Ému par ce superbe et tranquille horizon,                               3
Le déluge fermait ses invisibles portes.                                  4
L’étendue enivra mon esprit et mes yeux.                               5
Les arbres regonflés et recouverts d’écailles                         6
Flottaient comme un tissu très fin dans l’or des pailles ;        7
L’univers étourdi penchait sur ses essieux.                             8
Le soleil dans les flots avait noyé ses flammes.                     9
Savions-nous, quand mourait le feu dont nous brûlâmes    10
Tout ce qui doit mourir, tout ce qui doit cesser ?                  11
La bonne flèche aiguë, et sa fraîcheur qui dure ?                12
Ô famille ! Ô mystère ! Ô cœur de la nature !                       13
J’étais seul, l’autre soir, au Théâtre-Français.                      14

Il est construit grâce à la collaboration involontaire desolitude

1. Arthur Rimbaud (Paris se repeuple). 2. Charles Baudelaire (Le Balcon). 3. Victor Hugo (À Villequier). 4. Victor Hugo (La sortie de l’ombre). 5. Maurice de Guérin (Les Retrouvailles). 6. Paul Valéry (La jeune Parque). 5. Maurice de Guérin (Les Retrouvailles). 7. Paul Verlaine (Amour). 8. Gérard de Nerval (Le Christ aux oliviers). 9. Lecomte de Lisle (Les Hurleurs). 10. Henry de Régnier (La Lune jaune). 11. Anna de Noailles (Les Regrets). 12. Paul Verlaine (Sagesse). 13. Alphonse de Lamartine (La vigne et la maison). 14. Alfred de Musset (Une soirée perdue).

LES BEAUX ÉTÉS SANS TOI

Regarde! Je viens seul m’asseoir sur cette pierre            1
Où jadis, pour m’attendre, elle aimait à s’asseoir.             2
Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir,         3
L’air est parfois si doux qu’on ferme la paupière.              4
Il est d’étranges soirs où les fleurs ont une âme                 5
Embaumant les jardins et les arbres d’odeur,                    6
La cendre du soleil nage sur l’herbe en fleur.                     7
Nous sommes tous les deux voisins du ciel, Madame!    8
Aux regards d’un mourant, le soleil est si beau.                9
Les beaux étés sans toi, c’est la nuit sans flambeau !    10
Que ne m’est-il permis d’errer parmi les ombres!           11
Maintenant, ô mon Dieu, que j’ai ce calme sombre,       12
Il n’est rien de commun entre la terre et moi.                    13
Hélas! en te perdant, j’ai perdu plus que toi.                    14

Sont intervenus à leur insu :solitude1

1. Lamartine (Le Lac) – 2. Victor Hugo (Tristesse d’Olympio) – 3. Baudelaire (Harmonie du soir) – 4. Arthur Rimbaud (Roman)- 5. Albert Samain (Il est d’étranges soirs) 6. Ronsard (Amours de Marie II) – 7. Leconte de Lisle (Le Sommeil de Leilah)- 8. Victor Hugo (Ave Dea, mortiturus te salutat) – 9. Marceline Desbordes-Valmore (Les Séparés) – 10. Lamartine (L’Automne) – 11. La Fontaine (Adonis)  – 12. Lamartine (L’Isolement) – 13. Victor Hugo (A Villequier) -14. Boileau (A Iris).

Mona soiffée de vers…


[1] Habit fait de divers éléments disparates. Patch venant de l’anglo-normand : « pieche » qui vient de pièces

Cap au sud

Bartolomeu Diaz était intendant des magasins royaux à la cour du roi du Portugal, Jean II. En 1482, il participa à la première expédition de Diogo Cão [1], en Afrique. En 1486, Jean II lui confia le commandement d’une expédition  pour  poursuivre plus au sud celles de Diogo Cão et de d’Aveiro qui s’étaient arrêtées au Congo.

Bartolomeu_dia_cape_of_good_hopeLa flotte, composée de deux caravelles et d’une nef de ravitaillement quitta Lisbonne en août 1487. Il mit cap au sud malgré les légendes terrifiantes, dans lesquelles des monstres sortant de l’eau engloutissaient les navires.

En 1488, une tempête l’obligea à débarquer dans la baie Aguada de São Brás [2] : il venait de passer la pointe sud de l’Afrique, qu’il baptisa « Cap des tempêtes ».[3]
Diaz voulut s’assurer que le Cap était bien le passage tant recherché et s’aventura un peu plus remontant le long de l’Afrique orientale. La côte s’incurvait effectivement vers le nord. Mais la fatigue de son équipage l’obligea à rentrer au Portugal.

Après plus de 16 mois passés en mer, les deux caravelles arrivèrent triomphalement à Lisbonne en décembre 1488.
La route des Indes était ouverte.
Au milieu de la foule venue les accueillir sur le port, se trouvait un génois nommé Christophe Colomb. Il était venu à Lisbonne défendre le projet d’une route des Indes par l’Ouest. Il comprit qu’il devrait trouver un autre « sponsor »…

En 1494, le traité de Tordesillas [4] fixait des règles favorables aux découvertes de nouveaux territoires. L’année suivante, Jean II décida d’aller jusqu’en Inde et confia le commandement d’une flotte au jeune Vasco de Gama. Mais le roi mourut peu après et le départ n’eut lieu qu’en 1497. Diaz était à la tête d’un des navires.

En 1500, Bartolomeu Diaz repartit une nouvelle fois pour les Indes ; cette fois, sous la direction de Pedro Alvares Cabral. Mais une tempête engloutit quatre navires de l’expédition…et il périt au large du cap de Bonne-Espérance.

– Mona, en mémoire de ce grand homme, je vous propose un verre d’Alentejano ou d’Estremadura ?
– Comment ?
– Ah, bon, plutôt un doigt de Porto…


[1] Explorateur portugais (1450-1486) qui fit deux voyages le long de la côte atlantique de l’Afrique au XVe siècle.
[2] De nos jours : Mossel Bay en Afrique du Sud, au bord de l’Océan Indien..
[3] Cap de Bonne-Espérance.
[4] Traité, signé à l’initiative du Pape, qui traçait les limites territoriales entre l’Espagne et le Portugal : tout ce qui serait découvert à l’ouest du méridien 46°37’ouest (Amérique moins le Brésil) appartiendrait à l’Espagne et, à l’est (Brésil, Afrique et…) au Portugal.

Citations

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Rien de tel que de lire quelques citations sur le vin… surtout si l’on est à la plage : çà rafraîchit.

  1. Je lègue ma cave à ma femme sous réserve qu’elle se remarie. Après ma mort, un autre que moi connaîtra l’Enfer et le Paradis sur terre.
    Paul Scaron
  2. – Monsieur, si j’étais votre épouse, je mettrais du poison dans votre vin !
    – Madame, si j’étais votre mari, je le boirais.
    W. Churchill
  3. De la naissance à la mort, la route est bien courte. Je la prolonge en zigzagant.
    Claude Aveline
  4. Qui sait déguster ne boit plus jamais de vin mais goûte des secrets.
    Salvador Dali
  5. Boire du vin, c’est boire du génie.
    Charles Baudelaire
  6. L’appétit vient en mangeant, la soif disparaît en buvant.
    François Rabelais
  7. Les bons crus font les bonnes cuites.
    Pierre Dac
  8. Une belle femme et le vin font de doux poisons.
    Proverbe Oriental
  9. La pénicilline guérit les humains ; le vin les rend heureux.
    Sir Alexander Fleming

Mona doucie par les vers et les verres

Y a de la cuite dans les idées

Le « binge drinking »[1] pourrait se solder par une épidémie de cirrhose du foie en Grande-Bretagne d’ici une vingtaine d’années. Ce phénomène anglais se propage notamment chez les jeunes dans toute l’Europe.

francois1editCette façon de boire à outrance était déjà fort répandue chez nos aïeux. Plusieurs monarques tentèrent de stopper cette fâcheuse habitude.
En l’année 802, Charlemagne publia un édit qui défendait de s’enivrer; dans ce texte, les ivrognes étaient déclarés incapables de témoigner en justice, fût-ce dans leur propre cause. En 1536, François 1er, suite à des désordres arrivés en Bretagne à cause de gens ivres, publia un édit qui s’appliquait à tout le royaume. Il y est promulgué que tout homme, pris en état d’ivresse, sera condamné, la première fois, à aller en prison, au pain et à l’eau. La seconde fois, il sera fouetté entre les deux guichets ; la troisième, il sera fouetté publiquement ; et en cas de nouvelle récidive, il sera banni[2] après amputation des oreilles.

En Angleterre, les ivrognes étaient soumis à un châtiment moins cruel. On se contentait de les promener par la ville dans un tonneau.

En conclusion, Mona, il ne faut pas boire trop ni trop vite… çà ne doit pas vous empêcher de sortir deux verres pendant que je descends à la cave… Je vous propose un Corton-Charlemagne.


[1] Consommation excessive d’alcool en un minimum de temps

[2] Exilé

Le (ou la) Mourvèdre ou Tinto Mourvedre

bandolIl est présent en Australie et Californie sous le nom de Matoro. Cépage du Midi de la France, on pense qu’il nous vient de Mourviedro prés de Valence ou de Matoro en Catalogne, mais sur place, en Espagne on ne trouve aucune trace tangible de son historique présence …
Il fut longtemps méprisé et considéré comme cépage d’appoint. C’est tout à l’honneur des viticulteurs de Bandol que d’avoir réussi à le rendre majoritaire sur leurs magnifiques restanques. Rude, le Mourvèdre mûrit tardivement et a besoin de beaucoup de chaleur. De port droit avec une peau épaisse, il est présent un peu partout dans le sud-est, à Chateauneuf-du-Pape, parfois un peu en dépit du bon sens. Sur des Coteaux surchauffés, plein Sud, ce cépage à forte personnalité, sous estimé donne un vin puissant, sauvage, très tannique avec des notes de violette, de confiture brûlée, de myrtille, de cuir, de réglisse, de iode et de truffe… et avec un potentiel de vieillissement très important. Il a un bel avenir chez les viticulteurs soucieux d’originalité et d’authenticité.

Mona envie de boire un Bandol

Au pied des stalles

paix-d'aix-1748-louis-XV
Allégorie en l'honneur de la publication de la paix d'Aix-la-Chapelle de Jacques Dumont - Musée Carnavalet Paris

La Place de la Concorde, a été créée par l’architecte de Louis XV, Ange-Jacques Gabriel. Les travaux commencent en 1754. Elle est achevée en 1763. Son nom lors de son inauguration est évidemment : Place Louis XV.

En juin 1765, au centre de la place, fut dressée une statue équestre du Roi. Ce monument de bronze fut fixé sur un piédestal. A chacun des angles, quatre statues personnifiaient les vertus royales : Force, Amour de la Paix, Justice et Prudence.

Mais si au début de son règne, Louis XV fut surnommé le « Bien-aimé », il n’en était plus de même à cette époque. Et ce d’autant plus, que malgré la victoire de la France, c’est la Prusse qui tira le plus de bénéfice de la victoire et du  traité d’Aix. Il en reste cette expression : « travailler pour le Roi de Prusse ».

L’opinion est tellement remontée contre le gouvernement et contre son Roi qu’une main anonyme et spirituelle écrivit, sur le socle de la statue, ce distique[1] resté célèbre :

« Ah ! La belle statue! Oh! Le beau piédestal
Les vertus sont à pied et le vice à cheval. »

Mona, je ne sais pas si je suis votre bien-aimé, mais en tous cas, j’aurais bien aimé boire un coup… avant que vous ne me fassiez perdre la tête. Et pas un vin d’Argenteuil ou de Suresnes… et encore moins un Bourbon.


[1] Groupe de deux vers renfermant un énoncé complet

Il faut Luther pour manger

revoc-edit-nantes
Révocation de l'Edit de Nantes

Les dragons du roi étaient réputés avoir fort appétit. Aussi, on envoyait un nombre supérieur aux capacités d’accueil chez les protestants récalcitrants.

Louis Lacour, historien du XIX° siècle a retrouvé dans les archives le récit d’une dragonnade[1] qui eut lieu à Caen en 1685.

Après avoir recensé les Réformés, un régiment du roi entra dans la ville de Caen et on envoya aux récalcitrants le double de soldats qu’ils pouvaient loger. Mais certains s’étaient méfiés et avaient émigré. Ainsi un nommé Michel Néel, sieur de la Bouillonière pressentant qu’on allait lui imposer le logement des officiers du régiment, avait vendu ses meubles, fermé son hôtel particulier et était passé en Angleterre. Le Prévost et le lieutenant s’installèrent donc dans une auberge voisine sise rue des Teinturiers et dont l’enseigne disait « A l’Aigle d’Or, Catherine Drouart, loge à pied et à cheval ». Ils produisirent un billet indiquant qu’ils devaient loger chez le sieur de la Bouillonière, et que « en cas que la maison ne soit ouverte, ils logeront à l’Aigle d’Or aux frais dudit sieur ». La veuve Drouart crut sa fortune venue. Entre le 19 Novembre 1685 et le 5 Avril 1686, les deux hommes consommèrent pour 1110 livres de nourriture, gîte et couvert, somme énorme pour l’époque. La veuve ne fut jamais réglée, et ayant gardé tous les billets de logement des deux hommes, elle écrivit au ministre Monsieur de Chateauneuf demandant le règlement, s’estimant « réduite faute de ce payement à l’indigence ». On ne sait si elle fut réglée, mais il nous reste la liste précise de ce que ces deux officiers royaux avaient consommé.

dragonnades-copie-11Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ces deux lascars avaient bon appétit et ne s’étaient pas privés : ainsi le lundi 20 novembre, ils mangèrent à dîner : cinq quartes de vin, un pain, une soupe et un chapon, du boeuf et du mouton, une gélinotte et une douzaine d’alouettes, une fricassée de poulets, une salade de champignons, douze noix confites, deux douzaines de biscuits et de macarons, une assiette de poires et de sucre, ainsi que deux fagots et une bûche et un jeu de cartes ! Le mardi 21 Novembre 1685, ils consommèrent trois pots de vin, un pain, une poularde et trois perdrix, une douzaine d’alouettes et trois pluviers, une salade, une tourte, douze biscuits, une assiette de poires et de sucre, deux assiettes de cerises et de verjus. Le samedi 25 Novembre, ce fut à souper deux pots de vin, un pain, deux merlans, un plat d’oeufs au lait, un plat d’oeufs à la tripe, une salade de céleri et de chicorée, douze noix confites, des cerises et du verjus, des poires, des marrons et du sucre. Parfois, ils rajoutaient du vin d’Espagne, des bécassines, des épaules de mouton, etc… Seul le Carême limita un peu leur appétit pantagruélique.

L’analyse de ces repas laisse pantois. On peut penser que nos deux sbires n’ont pas pu manger tout ce qui a été facturé, bien que l’appétit des dragons fut réputé. Il est peu vraisemblable que la veuve ait falsifié ses factures face aux officiers royaux. Mais nos deux officiers, vivant aux frais du dragonné, ont sûrement largement tenu table ouverte et régalé la galerie.

Mona plus faim du tout


[1] Nom donné aux persécutions dirigées contre les communautés protestantes parce qu’on y employait les dragons de la couronne pour les convertir par la force.

C’est à boire… qu’il nous faut

LES-AMANTS-DU-PONT-ST-JEANTout le monde connaît la chanson « Boire un petit coup, c’est agréable ». Avec « Frère Jacques », c’est la chanson française la plus connue au monde. Il n’ya guère de réunions amicales, de banquets, de noces… où elle n’est reprise en chœur. Mais bien souvent, seul, le premier refrain est connu. Et pour cause… cette chanson a été composée par Félix Boyer en 1910 durant son service militaire[1]. Le Théâtre aux Armées en fit un succès durant la première guerre mondiale. Mais c’était sous son titre initial : « Allons dans les bois, ma mignonette ».

Il faut attendre 1947 : Valbonne écrit un couplet pour le film « Les amants du pont Saint-Jean » en reprenant la musique de F. Boyer. Ce couplet, chanté par Michel Simon et Gaby Morlay, aura un tel succès, qu’il donna son titre à la chanson. En lisant l’intégralité des couplets, on voit bien que le premier et les suivants sont fort différents. Autant le premier couplet est une invitation à boire, autant les suivants sont paillards. Mais le fait de boire un petit coup ne favorise-t-il pas les choses de l’amour ?

guinguetteBoire un petit coup c’est agréable
Boire un petit coup c’est doux
Mais il ne faut pas rouler dessous la table
Boire un petit coup c’est agréable
Boire un petit coup c’est doux

Allons dans les bois ma mignonnette
Allons dans les bois du roi !
Nous y cueillerons la fraiche violette
Allons dans les bois ma mignonnette
Allons dans les bois du roi !

Non Firmin, tu n’auras pas ma rose
Non Firmin, tu n’ l’auras pas
Car monsieur le curé a défendu la chose
Non Firmin, tu n’auras pas ma rose
Non Firmin, tu n’l’auras pas

J’aime le jambon et la saucisse
J’aime le jambon, c’est bon !
Mais j’aime encore mieux le lait de ma nourrice
J’aime le jambon et la saucisse
J’aime le jambon, c’est bon !

Pendant qu’on y est, je vous livre les paroles d’une autre chanson indispensable aux agapes en tout genre, même si elle fait plutôt salle de garde…

guinguette2Amie Mona, Amie Mona, lève ton verre
Et surtout ne le renverse pas.
Et porte-le au frontibus,
Au nazibus,
Au mentibus,
Au ventribus,
Au sexibus,
Et glou et glou et glou …
Elle est des nôtres,
Elle a bu son verre comme les autres.
C’est une ivrogne,
Çà se voit rien qu’à sa trogne.

Et pour les nostalgiques de la valse musette, cet hymne au vin populaire.

Ah ! le petit vin blanc
Qu’on boit sous les tonnelles
Quand les filles sont belles
Du coté de Nogent
Et puis de temps en temps
Un air de vieille romance
Semble donner la cadence
Pour fauter, pour fauter
Dans les bois, dans les prés
Du côté, du côté de Nogent

De nos jours, cette chanson serait peut-être censurée en France. Le vin n’y est plus en odeur de sainteté. Serge Lama le dépeint bien dans une de ses chansons :

Aux communions quand je chante « le petit vin blanc »
Je deviens la risée de mes propres enfants
Je me fais traiter de tocard
De réactionnaire, de ringard
Par mes bâtards

Bon Mona, çà s’impose, un petit coup de blanc ? C’est vrai c’t’histoire que les femmes aiment le goût du blanc ?


[1] Epoque propice à la découverte ou l’approfondissement des plaisirs bachiques