Peau lisse

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En 2009, je rappelais qu’Arsène Houssaye était tombé dans l’oubli et que peu de ses ouvrages étaient encore lus. Et pourtant depuis quelques jours, les articles le citant fleurissent. Mais ils ne parlent pas de la qualité littéraire de l’auteur mais de la couverture d’un de ses ouvrages conservé à la bibliothèque d’Harvard.

Une note manuscrite de la fin du XIX° siècle insérée dans le livre explique :

Ce livre est relié en peau humaine parcheminée, c’est pour lui laisser tout son cachet qu’a dessein on n’y a point appliqué d’ornement. En le regardant attentivement on distingue facilement les pores de la peau. Un livre sur l’Ame humaine méritait bien qu’on lui donnait un vêtement humain : aussi lui avais je réservé depuis longtemps ce morceau de peau humaine pris sur le dos d’une femme… ».

Des études viennent de  prouver que l’auteur disait vrai. On sait maintenant que le Docteur Ludovic Bouland (1839-1932), ami de Houssaye avait bien utilisé la peau d’une femme pour relier Des Destinées de l’âme publié en 1879.

On sait même qu’il s’agit d’une malade internée en psychiatrie décédée d’un arrêt cardiaque dont le corps n’avait pas été réclamé.

Si aujourd’hui ce comportement nous semble inhumain, du XVI° au XIX° siècle, cette pratique ne choquait pas. Bouland, bibliophile réputé y voit une façon d’honorer les écrits de son ami.

Et ces ouvrages reliés de la sorte ont une grande valeur pour les collectionneurs et on peut même trouver des livres à caractère érotique recouverts avec de la peau de seins où on distingue les mamelons. La peau des criminels était souvent utilisée pour couvrir des ouvrages d’anatomie ou des dossiers criminels. On considérait que c’était une continuation de leur punition au-delà de la mort.

Mais plus fort, c’était une preuve d’amour que d’offrir un morceau de sa peau à un être cher. On dit qu’une jeune Comtesse mourant de tuberculose céda une bande de sa peau pour relier le livre d’un astronome qu’elle admirait.

On attendit qu’elle expirât. Ouf, c’est mieux que dans l’antiquité où les prisonniers étaient souvent écorchés vifs.

Bon Mona, ça fait froid dans le dos, si j’ose dire. Je pense que boire un gorgeon nous fera le plus grand bien. Et je vous invite à déguster le vin d’un grand domaine  bourguignon : le Hautes Côtes de Nuits Clos Saint-Philibert Blanc 2006 de Méo-Camuzet. Un vin frais aux arômes séduisants de fruits exotiques et d’épices douces.

Faut bien çà Musset !

Sur les bancs de l’école, beaucoup d’entre nous ont appris des vers de Musset. Et la vie du poète nous était présentée toute lisse. Un écrivain romantique fauché à 47 ans à cause de problèmes pulmonaires…

En lisant la biographie de Gonzague Saint Bris, on découvre un écorché, ivrogne, fumeur, fréquentant assidument bordels et tripots. Un dandy qui dépense l’argent de ses parents et qui papillonne de femme en femme, se lassant de toutes ; mais écrivant de magnifiques textes d’un jet, sans ratures.

Le 12 février1852[1], Alfred de Musset est élu à l’Académie Française. Au mois de mai suivant, il fait son entrée officielle en habit vert et le soir même, il s’en va souper au Palais Royal où son ami, Arsène Houssaye l’aperçoit ainsi :
« Au dessert, grand bruit dans les escaliers. On éclaire la descente funèbrement joyeuse d’un homme ivre mort. On s’informe, c’est Alfred de Musset qui pour fêter son introduction a payé à dîner à un bordel. »

Quelques jours plus tard, Sainte-Beuve l’admoneste. Musset lui répond :
-Mais vous allez bien au bordel, vous aussi !
-Oui, mais, moi, je n’y demeure pas !

Son vice est désormais de notoriété publique, ce qui fait dire à ses collègues du Quai de Conti[2] lorsqu’il est absent de la séance hebdomadaire :
-Monsieur de Musset s’absente
-Vous voulez dire qu’il s’absinthe !

L’homme est un loup pour ses frères, n’est-il point Mona. Bon, ben, nous, on est des adultes, on pourrait p’t-être sans faire un petit. Cà, le fait est. Seulement le tout venant a été piraté par les mômes.

Mais, je vous rassure Mona, on ne va pas se lancer dans le bizarre. Je vous propose un Champagne Jacquesson Avizé Grand Cru 2000. Une explosion de fleurs, de minéralité, une bouche tout en finesse et quelle longueur en bouche.


[1] Soit cinq ans avant son décès le 2 mai 1857
[2]
Adresse de l’Académie

Où c’est ? à Paris

houssaye1On ne lit plus guère Arsène Houssaye(1815-1896) qui a pourtant publié de nombreux ouvrages, s’essayant avec plus ou moins de bonheur, à tous les genres littéraires. Son nom reste connu (une rue porte son nom à Paris 8°) car il fut, entre autres, administrateur général de la Comédie-Française et fit jouer des pièces de Victor Hugo, Alexandre Dumas…. Il devint également directeur de L’Artiste, revue qui accueillit nombre de jeunes talents tels que Charles Baudelaire. Ce dernier lui enverra une dédicace célèbre lors de la publication du Chasse Spleen.

Dans « Les Confessions », souvenir d’un demi-siècle, il évoque les folles soirées de l’époque. Arsène aimait le théâtre, ses entractes et le vin de champagne. A propos d’une représentation à la Comédie française, il écrit :

« Nous commençâmes la fête à huit heures du soir, il y eut un souper à minuit. Dumas avait d’abord demandé des femmes, mais les femmes ne vinrent pas. Le souper n’en fut pas moins gai, le vin de champagne raviva la verve. À peine à table, c’était à qui trouverait une scène ou un mot. Verteuil avait son encrier à côté de sa coupe de vin de champagne. Il lui arriva plus d’une fois de tremper sa plume dans la coupe, mais il ne lui arriva point de prendre son encrier pour y boire ».

Ah, Mona, quelle période bénie des dieux ! Buvons. Buvons cette Malvasia Delle Lipari 2004. C’est un nectar produit sur des poussières d’iles proches de la Sicile. Ma que …, que c’est bon !!!