Des gars, des os

L’année 1793, fut une des plus folles que connut la France. Les exécutions se suivirent à la chaîne. Après Louis XVI en janvier, ce fut le tour de Marie-Antoinette et des Girondins en octobre, d’Olympe de Gouges en novembre et de Madame du Barry en décembre. Cette même année, les restes des rois furent exhumés, pillés ou détruits. Les restes furent jetés dans une fosse commune.
Un texte de l’époque relate ce déchainement. C’est le « Journal historique de l’extraction des cercueils royaux, dans l’Église de Saint-Denis, fait par le citoyen Druon, ci-devant bénédictin« .

Le premier jour, le samedi 12 octobre dans l’après-midi, les ouvriers chargés des exhumations descendirent à la lueur de torches et de lanternes vers le caveau des Bourbon situé dans la galerie souterraine.
Le premier roi à être sorti de son repos est Henri IV qui apparut, momifié, incroyablement bien conservé, avec sa barbe blanche intacte et « les traits du visage parfaitement reconnaissables » selon plusieurs témoins. Le cercueil ouvert fut ensuite exposé durant plusieurs heures, dressé contre l’un des piliers du passage des chapelles basses. De nombreuses anecdotes ont circulé sur l’attitude adoptée par le public à ce moment-là, dont l’épisode légendaire d’un soldat qui va trancher la barbe d’Henri IV, le roi guerrier et conquérant, pour en faire une moustache postiche avant de s’écrier : « et moi aussi je suis soldat français et désormais, je n’aurais plus d’autres moustaches. Maintenant, je suis sûr de vaincre les ennemis de la France et je marche à la victoire ».
Le soir venu, les ouvriers partent et laissent le roi dressé seul, sur son pilier.

Deux jours plus tard, le lundi 14 octobre, le travail reprend vers 3 heures de l’après-midi. Ils prennent le corps d’Henri IV et le jettent le premier dans la fosse commune creusée spécialement pour les Bourbon.

Un des profanateurs et voleur de restes humains est Alexandre Lenoir, directeur du Musée des Monuments Français. On sait qu’il vola notamment quelques poils de la moustache d’Henri IV pour en donner ensuite une partie à son ami Vivant Denon qui dirigeait le Louvre.

Les poils de moustache d’Henri IV sont conservés dans un reliquaire au musée Bertrand de Châteauroux et offrent, là encore, une excellente traçabilité.

Mona pas de sympathie révolutionnaire.

Je tire sur tout ce qui bouge

Les Bourbons ont tous été passionnés par la chasse. Louis XIII avait fait construire un pavillon de chasse à quelques lieues du Louvre pour pouvoir chasser le plus longtemps possible et pouvoir se reposer sans avoir la contrainte de rejoindre Paris. Son fils, le roi Soleil, le conservera précieusement en l’agrandissant sans cesse pour en faire le Château de Versailles.

Dès leur prime enfance, les princes étaient conditionnés. Ainsi un certain Barbier rapporte que le futur Louis XV, âgé de 6 ans, avait des divertissements peu habituels : dans une vaste salle, étaient réunis un millier de moineaux, au milieu desquels on lâchait les oiseaux de la fauconnerie : le sang, les plumes tombées à terre, les cris et l’effroi des moineaux, amusaient fort le jeune prince. Agé de 13 ans, il se rendit à la Muette avec une biche qu’il avait nourrie et élevée. Il décida de la tuer. Il l’a fit éloigner, il tira et la blessa. La biche revint vers lui ; il la fit remettre au loin, et tira une seconde fois et la tua.

Sur les registres de Versailles, on relève un nombre de plus de 100 cerfs tués, chaque année, par Louis XV.

Heureusement, semble dire le chroniqueur, à l’âge de 26 ans, il se mit en chasse d’un autre gibier : les femmes. Ce changement sauva la vie à nombre de cervidés…

Mais ironie de l’histoire, on retrouve des cerfs au milieu des femmes. Madame de Pompadour, maîtresse du Roi, ayant cessé toute relation physique après quelques années, souhaitait conserver son rôle de favorite. Pour combler cette absence, fut créé avec sa complicité, le « Parc aux Cerfs« . Cette demeure toute proche du château était le logement d’un véritable harem à disposition du Roi… C’est là que Louis XV s’enticha de la du Barry.

Enfin, le 10 mai 1774 dans sa 64e année, après un règne de cinquante-neuf ans, Louis XV ne mourut pas d’un accident de chasse, mais de la petite vérole.

Pour accompagner un filet de biche, Mona, je vous propose un Cornas 2000 de Thierry Allemand. Un vin alliant puissance retenue et finesse. Chapeau bas…