Fish de cuisine

mona-filets-poisson

Dans ces pages, nous dénonçons régulièrement les pratiques des industriels de la bouffe qui nous prennent uniquement pour des cons-sommateurs. Après la glace aérée, après les informations erronées sur la composition des plats, nous avons le déplaisir de vous présenter le trempage de filets.

Pour ce, nous nous appuierons sur un article du Monde du Surgelé. Les fraudeurs ont réfléchi : l’eau revient moins chère que le poisson. Aussi par trempage ou par injection, on augmente le poids de la marchandise de 10 à 30%. Puis on glisse le tout dans un paquet en carton et le tour est joué. De toute façon, je vous rassure : à l’œil, un non professionnel n’y voit que du feu. Par contre lorsqu’il cuit  son bout de poisson, l’acheteur le voit rétrécir aussi vite et aussi fort qu’un pull lavé à 60°. Résumons, le con-sommateur a payé moins cher croyant faire un bon achat. Le professionnel lui, avec son prix sympa s’en met plein les fouilles et le filet qui devait nourrir deux personnes finit dans la gamelle du chat.

Le syndicat national du commerce extérieur des produits congelés et surgelés (SNCE) s’est saisi du problème et il assure qu’à dater de cette année, il lancera une campagne de contrôle sur cette pratique malhonnête.
Et bien, nous saluons cette initiative, n’est-il point Mona ? Je vous propose de continuer à découvrir les vins d’Emmanuel Reynaud du Château Rayas. Aujourd’hui, dégustons Pignan 2008. Encore cette touche inimitable pour un Châteauneuf du Pape qui me mène au ciel. Si, si…

Vous avez fini de papauté !

Mona et le Pape à Châteauneuf du Pape

Le vignoble de Chateauneuf-du-Pape doit son expansion à l’installation des Souverains Pontifes en Comtat Venaissin à partir de 1305. Cinq cent soixante plus tard, Alphonse Daudet et son ami Paul Arène se retrouvent à Clamart et écrivent ce qui deviendra «Les lettres de mon moulin».
Dans son recueil de nouvelles et de contes, on peut lire l’histoire de «la mule du pape».  J’ai retenu le début de ce texte qui est un hommage au bien vivre de ces prélats.

Qui n’a pas vu Avignon du temps des Papes, n’a rien vu… Ah ! l’heureux temps ! l’heureuse ville ! Des hallebardes qui ne coupaient pas ; des prisons d’État où l’on mettait le vin à rafraîchir. Jamais de disette ; jamais de guerre… Voilà comment les Papes du Comtat savaient gouverner leur peuple ; voilà pourquoi leur peuple les a tant regrettés !…

Il y en a un surtout, un bon vieux, qu’on appelait Boniface… Oh ! celui-là, que de larmes on a versées en Avignon quand il est mort ! C’était un prince si aimable, si avenant… Un vrai pape d’Yvetot, mais d’un Yvetot de Provence, avec quelque chose de fin dans le rire, un brin de marjolaine à sa barrette, et pas la moindre Jeanneton[1]… La seule Jeanneton qu’on lui ait jamais connue, à ce bon père, c’était sa vigne, — une petite vigne qu’il avait plantée lui-même, à trois lieues d’Avignon, dans les myrtes de Châteauneuf.

Tous les dimanches, en sortant de vêpres, le digne homme allait lui faire sa cour ; et quand il était là-haut, assis au bon soleil, sa mule près de lui, ses cardinaux tout autour étendus aux pieds des souches, alors il faisait déboucher un flacon de vin du cru, — ce beau vin, couleur de rubis qui s’est appelé depuis le Châteauneuf des Papes, — et il le dégustait par petits coups, en regardant sa vigne d’un air attendri. Puis, le flacon vidé, le jour tombant, il rentrait joyeusement à la ville, suivi de tout son chapitre ; et, lorsqu’il passait sur le pont d’Avignon, au milieu des tambours et des farandoles, sa mule, mise en train par la musique, prenait un petit amble sautillant, tandis que lui-même il marquait le pas de la danse avec sa barrette, ce qui scandalisait fort ses cardinaux, mais faisait dire à tout le peuple : «Ah ! le bon prince ! Ah ! le brave pape !»

Ma chère Mona, difficile de ne pas boire religieusement un vin du Domaine du Vieux Télégraphe 1998.  Assagi par le temps, il appelle une belle pièce de boeuf.  Par contre, je me demande pourquoi Daudet a appelé son pape Boniface alors qu’aucun pontife n’a eu ce nom à Avignon. 


[1] Femme aux mœurs légères

Talleyrand verse du vin

talleyrand-verreNapoléon ne supportait pas de rester longtemps à table lors des dîners officiels. Aussi, il demanda à Talleyrand de recevoir à sa place les hôtes de la France. La réputation, en matière de gastronomie, du Ministre des Affaires Etrangères n’est plus à faire. Avec son cuisinier, le célèbre Carême, il servait les meilleurs mets et vins à sa table.

D’ailleurs, en 1801, il se porte acquéreur du Château Haut-Brion. Et même, si le fameux classement n’existait pas encore, ce cru était déjà fort connu depuis plus de 150 ans

La famille de Pontac, créateur et propriétaire du domaine ouvre à Londres, en 1666, une taverne à « l’Enseigne de Pontac » qui devient rapidement l’établissement à la mode. Haut-Brion y est le premier vin du Bordelais vendu sous son nom. Dès le 10 avril 1663, dans son fameux journal[1], Samuel Pepys en parle : « Je bus une sorte de vin français appelé Ho-Bryan (Haut-Brion) qui avait un bon goût très particulier que je n’avais jamais rencontré… »

Talleyrand revendit Haut-Brion dès 1804, mais ce vin fut toujours servi régulièrement à sa table.

Comme tout amateur, Talleyrand ne se cantonnait pas aux vins d’une seule provenance. Ainsi, un jour qu’il avait fait servir un Châteauneuf-du-Pape. Un de ses hôtes vida son verre d’un trait. Trop courtois pour faire directement une leçon à un invité,  Talleyrand se tourna vers sa voisine :

« Quand un vin a une belle robe, chère Duchesse, il le faut contempler longtemps du regard. Puis vous l’approchez, vous le humez et d’un grand soupir, vous imaginez tout ce qu’il évoque en vous …chaleur, tendresse, apaisement… Alors… vous reposez le verre… pour en parler. Un peu plus tard, vous oserez le porter à vos lèvres, comme la main d’une jolie femme… et ce geste-là vous permettra d’aller plus avant… Ne pensez-vous pas qu’on ne jouit vraiment que de ce dont on sait se frustrer ?… »

Bravo, çà c’est envoyé, mon Charlot

Enfin une petite annonce : Monsieur le Président de la République, vous qui ne buvez pas de vin, si vous avez besoin d’une quelqu’une pour tenir place aux repas de la République, je suis disponible….

Votre Mona tend une réponse


[1] Ce journal couvre la période 1660-1669. Il est en langage codé. Ce n’est qu’en 1822, qu’il sera décrypté. Et c’est seulement depuis 1983, qu’il a été publié intégralement et non expurgé.