Elle conserve Du Barry

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Madame du Barry et Louis XV

La  comtesse du Barry, maîtresse de Louis XV, aimait préparer pour son royal amant des mets aphrodisiaques. Ainsi, elle lui fit servir un apprêt d’œufs de vanneau, volatile réputé au sang chaud, comme le pigeon, champion infatigable du coït, selon Aristote qui dit de lui : « il copule, en une heure 83 fois…! ».

Il faut dire que ce légume avait la réputation d’être si émoustillant qu’on le déconseillait formellement aux pucelles, comme en témoigne la confession timide d’une héroïne du « Roman bourgeois » d’Antoine Furetière (1666) :
« Si quelqu’une de nous eût mangé des asperges et des artichauts, on l’aurait montrée du doigt ; mais aujourd’hui, les jeunes filles sont plus effrontées que des pages de Cour ! ».

Revenons à la du Barry. On dit qu’elle avait obtenu la recette ci-dessus auprès d’une dame qui s’y connaissait : Marguerite Gourdan, dite la Petite Comtesse. Elle tenait une maison entièrement vouée au « culte de Vénus ». Elle publia même à l’intention de ses protégées un ouvrage au titre évocateur : « Instructions pour une jeune demoiselle qui veut faire fortune avec les charmes qu’elle a reçus de la nature« . Son établissement fut fréquenté par tout le beau linge parisien. Un passage secret permettait aux nobles et gens d’Eglise de rentrer sans attirer l’attention.
A son décès, bien que sa maison ait disparu depuis plusieurs années, les chanteurs populaires firent une chansonnette aux paroles si crues que je ne publierai que la première strophe :

Nobles maquereaux et véroles,
Versailles, Paris sont affolés !
Tous prenons le deuil dès ce matin
Pour cette tant renommée catin.
Oui, Gourdan la maquerelle est morte,
Est morte comme elle avait vécu,
La pine au cul
Le corbillard est à sa porte
Escorté par trois cents putains
La pine en mains.

Et au fait, Mona, mon petit pigeon, si vous sortiez l’assiette d’asperges et d’artichauts, moi je m’occupe de déboucher le muscat…

Coeur d’artichaut

Ce fut un chardon originaire soit d’Afrique du Nord, d’Egypte ou d’Ethiopie ! Via l’Italie, il fut introduit sur la table royale par Catherine de Médicis. Pierre de l’Estoile (auteur  Registres Journaux qui sont un précieux témoignage sur les règnes de Henri III et Henri IV) rapporte que la Reine s’en « gava » tellement au cours d’un mariage que ce fut au point d’avoir une terrible indigestion. Il faut dire que le plat était accompagné de crêtes et de rognons de coq (aphrodisiaque très recherché au XVI° siècle). Elle faillit « en crever ».

artichautDe couleur violette (violet de Provence, Romanesco, Chrysanthème) ou vert cendré (Camus, blanc Hyérois, blanc d’Espagne) il nous vient beaucoup du Finistère et un peu de la Provence et du Roussillon. Le bordelais, lui, ne jure que par celui de Macau. Mon cher Lépicurien profite toujours d’aller faire ses amplettes à Macau pour goûter les vins des Châteaux Maucamps ou Cantemerle (Châteaux du Haut-Médoc)…. Il faut dire que c’est un connaisseur, mon patron, ah (soupir langoureux) !!

Cru, on le sert au gros sel, à la vinaigrette ou hachis de basilic.

Cuit, les fonds accompagnent la sauce blanche pour le veau. Mixés avec de la crème fraîche et des échalotes, ils sont une garniture raffinée pour viandes et volailles. Un Quincy, un Bourgogne Irancy, un Crozes Hermitage blanc, un Arbois blanc, un Savoie devraient permettre à chacun de trouver son plaisir.

Avant guerre, les “clochards” et autres “S.D.F.” étaient très mal tolérés dans Bordeaux intra muros … La Maréchaussée faisait des rafles : après les avoir copieusement rossés, elle abandonnait ces marginaux dans la nature du côté de Macau. Ils n’avaient plus qu’à s’en aller ou à revenir à Bordeaux à travers champs. Il en est resté une expression typiquement “bordeluche” : “aller aux artichauts !”.

Et comme disait Coluche, l’artichaut, c’est un vrai plat de pauvre : t’en as plus dans l’assiette après l’avoir mangé. N’oublions pas qu’il favorise le transit urinaire et intestinal. Cependant, consommé en trop grande quantité, il peut provoquer des ballonnements.

Mais surtout, les effets bénéfiques de l’artichaut sur le foie et la vésicule biliaire sont connus depuis longtemps. Ils sont particulièrement appréciés au lendemain d’agapes bien arrosées.

Votre Mona …rtichaut s’éffeuille pour vous…