Therbousch et Boucher

Anne Dorothée Lisiewska, femme Therbousch, est une artiste peintre née à Berlin en 1721. Elle se rendit à Paris en 1765 et présenta un tableau au Salon de 1767. Diderot, dont, elle fit un portrait au torse nu, ne fut pas surpris que cette toile soit refusée. Il raconte

Elle avait préparé, pour ce Salon, un Jupiter métamorphosé en Pan, qui surprend Antiope endormie, je vis ce tableau lorsqu’il était presque fini. L’Antiope à droite, était couchée toute nue, la jambe et la cuisse gauche repliées, la jambe et la cuisse droite étendues. La figure était ensemble et de chair ; et c’est quelque chose que d’avoir mis une grande figure de femme nue ensemble ; c’est quelque chose que d’avoir fait de la chair. J’en connais plus d’un, bien fier de son talent, qui n’en ferait pas autant. Mais il était évident, à son cou, à ses doigts courts, à ses jambes grêles, à ses pieds, dont les orteils étaient difformes, à son caractère ignoble, une infinité d’autres défauts, qu’elle avait été peinte d’après sa femme de chambre ou la servante de l’auberge. La tête ne serait pas mal, si elle n’était pas vile. Les bras, les cuisses, les jambes, sont de chair; mais de chairs si molles, si flasques; mais si flasques, mais si, molles, qu’à la place de Jupiter j’aurais regretté les frais de la métamorphose. A côté de cette longue, longue et grêle Antiope, il y avait un gros ange joufflu, clignotant, souriant, bêtement fin, tout-à-fait à la manière de Coypel, avec toutes ses petites grimaces. Je lui observai que l’Amour était une de ces natures violentes, sveltes, despotes et méchantes, et que le sien me rappelait le poupart épais , bien fait, bien conditionné , de quelque fermier cossu. Cet Amour, prétendu caché dans la demi-teinte, levait précieusement un voile de gaze qui laissait Antiope exposée toute entière aux regards de Jupiter. Ce Jupiter satyre n’était qu’un vigoureux portefaix à mine plate, dont elle avait allongé la barbe, fendu le pied, et hérissé la cuisse : il avait de la passion ; mais c’était une vilaine, hideuse, lubrique, malhonnête et basse passion. Il s’extasiait, il admirait sottement, il souriait, il avait la convulsion, il se pourléchait. 

La suite de ce texte est une attaque en règle contre Boucher que j’ai eu le plaisir de vous présenter il y a quelques semaines.

Mona-rtiste, c’est vous ?

Pierrette et sa peau de lait

En cette année 1954, Marius Laroche, boucher de son état (ou de son étal – ndlr) est convoqué au tribunal de Lyon. Il a décidé de divorcer. Or à cette époque, le divorce par consentement mutuel n’existe pas. Seul moyen pour se briser les liens du mariage, prouver une faute du conjoint.

Aussi le juge demande à Marius d’exposer les griefs à l’encontre de sa femme.

Ce dernier prend la parole :

« Et bien voilà, Monsieur le Juge, quand j’ai épousé Pierrette, il y a 12 ans, je l’avais choisie pour ses rondeurs et sa magnifique poitrine. Elle était si belle, ma Pierrette que je l’appelais mon petit cochonnet. Quand je la voyais devant moi à la caisse de notre magasin, je pensais à ces belles charolaises que je travaille chaque jour sur mon billot. Mais patatras, cette femme que je chérissais et nourrissais avec amour, a décidé de faire un régime. Oui, Monsieur le Juge, un régime ! Elle a tellement fondue qu’elle est devenue aussi épaisse qu’une côtelette d’agneau découpée par un de mes concurrents. Et, actuellement, elle n’a pas plus de poitrine qu’une première communiante, elle qui avait une paire de seins qui aurait fait pâlir d’envie Jane Russell. Vous dire ! J’estime, en mon âme et conscience, qu’il y a tromperie sur la marchandise. Je n’ai pas épousé un fil de fer ou un squelette. Ah çà non ! Je veux récupérer ma femme entièrement et non pas la demi-portion qui me reste. Comme disait mon pauvre père, il vaut mieux faire envie que pitié. Voilà, Monsieur, le Juge, je vous laisse apprécier ma situation. Je ne connais pas votre épouse, mais vous comprendrez que moi, j’ai été abusé par Pierrette. « 

Ma Chère Mona, au crépuscule de cet été, vous avez su garder des formes généreuses qui vous siéent à merveille. Pour entretenir vos poignées d’amour, je vous propose un Sauternes qui vous apportera votre ration quotidienne de sucre en deux temps, trois mouvements mais avec que du bonheur. Le Château La Tour Blanche 2007 est une symphonie de fruits confits, abricots, miel…

Si çà va ? Faut pas se peindre

Je ne pose pas. J'ai chaud. Vous pouvez comprendre, non ?

Peindre une odalisque[1] est un classique. Généralement, la femme est étendue sur le dos et montre peu de son anatomie au public notamment au XVIII° siècle. Boucher a peint deux odalisques : la brune et la blonde. Ces tableaux firent scandale. La partie la plus charnue exposée aux yeux de chacun est une sorte d’invitation… Diderot qui n’aimait pas beaucoup Boucher écrivit même que le peintre avait prostitué sa femme :

N’avons-nous pas vu au Salon, il y a sept à huit ans, une femme toute nue étendue sur des oreillers, jambes deçà, jambes de-là, offrant la tête la plus voluptueuse , le plus beau dos, les plus belles fesses, invitant au plaisir, et y invitant par l’attitude la plus facile, la plus commode, à ce qu’on dit même la plus naturelle, ou du moins la plus avantageuse. Je ne dis pas qu’on en eût mieux fait d’admettre ce tableau, et que le comité n’eût pas manqué de respect au public, et outragé les bonnes mœurs. Je dis que ces considérations l’arrêtent peu, quand l’ouvrage est bon. Je dis que nos académiciens se soucient bien autrement du talent que de la décence. N’en déplaise à Boucher, qui n’avait pas rougi de prostituer lui-même sa femme, d’après laquelle il avait peint cette figure voluptueuse ; je dis que si j’avais eu voix à ce chapitre là, je n’aurais pas balancé à lui représenter que si, grâce à ma caducité et à la sienne, ce tableau était innocent pour nous, il était très-propre à envoyer mon fils, au sortir de l’académie, dans la rue Fromenteau[2], qui n’en est pas loin, et de-là chez Louis ou chez Keyser[3] ; ce qui ne me convenait nullement.

Donc si on en croit l’Encyclopédiste, le modèle fut Madame Boucher. Elle tourne la tête vers nous. Ce tableau peut être admiré au Louvre.


Pour la blonde, il faudra vous rendre à Munich. Quant à la jeune fille, il semblerait que ce soit Mademoiselle O’Murphy qui fut la maîtresse de Casanova puis de Louis XV. Elle regarde devant elle… Vers qui ? Son royal amant ?


Mona pas posée en odalisque. Dommage ?


[1] Femme de harem
[2]
Rue connue pour ses dames de petite vertu
[3]
Médecins du roi Louis XV

Le morceau du boucher

Au cours d’un week-end gris comme il en existe tant, un boucher se dispute avec sa femme. Le ton monte (et non, le thon monte). Notre homme s’emporte et finalement tue Madame. Habitant au dessus de son commerce, il descend le corps et, en bon professionnel, il le découpe dans les règles de l’art (et non de lard). Après quoi, il prélève le cœur, le foie et quelques morceaux très tendres qu’il vendra comme de la viande de veau. Il garantit que la « bête » a été nourrie uniquement avec de bonnes choses… Les clients en redemandent. Mais il répond qu’il aura du mal à retrouver une telle carcasse.

Pour se débarrasser du reste du corps, il cuisine dans de larges faitouts, jambes, bras, tronc… et empile des bocaux sur ses étagères. Ses amis, et même ses enfants se délectent de ces petits plats mijotés avec amour. Ah ce que c’est que d’aimer sa mère !

Mais avant qu’il n’ait eu le temps de servir l’ensemble de ses conserves de viande à femme (et non infâme), l’enquête sur la disparition de sa femme se résuma à un seul suspect : le mari.

Lors de son procès, il ne fut condamné qu’à 15 ans de prison. Faut dire que sa femme lui cherchait « l’époux » dans la tête depuis « belle burette »…

Mona pas envie de cuire sa viande…