Faites chauffer l’alcool

De nos jours, chaque mairie possède son service de l’Etat Civil et chaque naissance, mariage, décès y est inscrit. Mais il n’en pas toujours été ainsi. Les autorités religieuses ont commencé à se préoccuper de l’enregistrement des actes déterminant l’identité et la régularité du comportement de leurs fidèles à partir du XVe siècle, et en 1563 le Concile de Trente imposa à tous les desservants de paroisse la tenue des registres de baptêmes et de mariage pour éviter les mariages clandestins. Le pape Paul V, au début du XVII° siècle, y ajouta l’obligation de noter la date de décès. 

Mais comme le note Philomneste  dans son Livre des singularités, les registres servaient  dans certaines paroisses de journal de bord pour les prêtres chargés de les tenir. Ainsi,

le registre de la paroisse Saint-Landry, à Paris, pouvait servir de journal au vicaire. Ce bon prêtre y détaille naïvement les étrennes qu’il a reçues au commencement de l’année 1630 pendant quatre jours ; voici le résumé de ces cadeaux :

  • Onze bouteilles de vin, dont deux de blanc;
  • Quatre boîtes de conserve;
  • Trois chapons, dont un prêt à mettre à la broche;
  • Trois livres de bougie;
  • Deux fort bons fromages;
  • Deux grands pots de beurre;
  • Une bouteille d’hypocras;
  • Un lapin de garenne, une langue fumée, un gâteau et une talmouse[i];
  • Une douzaine de serviettes;
  • Une pistole d’Espagne, trois écus d’or. 

Mona a retenu dans cette liste l’hypocras et elle veut la recette. Etant toujours au pied de  mon assistance adorée, je m’exécute.

L’hypocras était un breuvage agréable, une espèce de vin de liqueur composé de divers ingrédients dont un vin léger et délicat était la base. Il y en avait plusieurs espèces ; l’une des plus anciennes recettes est celle que donne le vieux Taillevent, célèbre cuisinier du roi Charles VII. «Pour une pinte, dit-il, prenez trois treseaux[ii]  de cinnamome fine et parce, ung treseau de mesche, ou  deux qui veult ; demi-treseau de girofle, et de sucre fin six onces,  et mettez en pouldre ; et la fault toute mettre en ung coulouoir avec le vin, et le pot dessoubs, et le passez tant qu’il soit coulé, et tant plus est passé et mieux vault, mais qu’il ne soit esventé». Cette recette de Taillevent est, comme son style, un peu surannée.
Pour préparer l’hypocras des grands seigneurs,prenez du gingembre, de l’anis et du sucre. Quant à l’hypocras du peuple, il se fait avec de la canelle, du poivre et du miel clarifié. Mais de toutes ces anciennes liqueurs, la seule qui mérite un souvenir, est l’infusion de suc d’oranges de Séville avec le sucre dans un vin léger. En général, l’hypocras se faisait et se fait encore avec du vin, du sucre, de la canelle, du girofle, du gingembre et autres ingrédients. On en fait du blanc, du rouge, du clairet, du framboise, de l’ambré, etc., etc.

Hola, qu’elle me dit Mona, je vis au XXI° siècle et votre baratin, j’y entrave que dalle (je vous prie de noter que dans la vie courante et contrairement au style léché que vous avez plaisir à lire lorsqu’elle prend la plume dans ce journal, elle cause et jure comme un charretier).
-Bon, vous ne comprenez rien, dites vous ma mie. Qu’à cela ne tienne, belle enfant. Je vais vous la translater en français de notre temps :
Pour un litre d’hypocras, il vous faudra un litre de vin léger, 25g de cannelle, 8g de noix de muscade ou le double si vous le voulez, 4 g de clou de girofle. Réduisez en poudre et ajoutez 180g de sucre en poudre. Verser le tout dans le vin. Puis laissez macérer et filtrez.

Il n’y a plus qu’à servir frais. Mona, deux verres, je vous prie.


[i] Gâteau feuilleté de forme conique à la crème et au fromage
[ii] Un tréseau équivaut à environ 7,5g

Mon chien fait oie, oie !

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Les filles, je suppose que vous avez le même problème que moi. A quelques jours de Noël, c’est à moi que revient la lourde charge de penser le repas de réveillon. Pendant que les mecs se la coulent douce, il me faut choisir. J’hésite entre une oie ou un canard gras, sud-ouest oblige. Et cette brave bête est-elle encore en train de cancaner ? En fait soyons précis, si je choisis le canard, il est juste de dire qu’à ce jour, il cancane encore ; mais l’oie elle, elle ne cancane pas, elle cacarde. C’est un cri plus puissant qui permettait aux anciens d’utiliser les oies comme gardiennes. De nos jours, les paysans vous diront que ce palmipède vaut bien un chien pour prévenir le danger. D’ailleurs, rappelez-vous les oies du Capitole : au IV° siècle avant JC, alors que les barbares sont prêt à envahir Rome. les oies cacardent et les soldats romains sont réveillés et repoussent les assaillants.

Cancaner, par contre, peut aussi signifier répandre des propos malveillants ou même danser le cancan. Avouez que c’est moins noble.

Aussi, sans hésitation, je cuisinerai du canard cette année.

Mona fait son choix. Et vous ?

Ma bonne cave…

mona-yquem

Après 1900, 1915, 1930, 1951, 1952, 1964, 1972, 1974 et 1992, le Château d’Yquem ne produira pas de vin en 2012. Sur dix années sans production, quatre se terminent en 2 et cela arrive tous les vins ans. Décidément la nature est à la fois un métronome et une fantaisiste.

Cette décision engendre une perte financière de lors de 25 millions d’euros, mais elle garantit la qualité de ce cru qui est le seul dans tout le Bordelais à être classé 1er cru exceptionnel.

Bon Mona, je sais que vous aimez ce nectar. Aussi, je vous invite à déguster Yquem 1996. Le vin a un nez puissant et complexe, mêlant arômes d’abricots, miel et sirop d’érable… Et en bouche, grand équilibre et fraîcheur.

Le sommelier, c’est un de vins

En notre qualité d’œnopote, œnophile, en un mot d’amoureux des bons vins, nous souhaitons rendre hommage à une bien belle profession : Sommelier.

L’ »ânée » est un mot bien connu des cruciverbistes. C’était jusqu’au XIX° siècle, la charge de vin que pouvait porter un âne (une cenpote, soit110 litres). Ce transport se faisait sans crainte puisque, depuis Buridan, nous savons que, si l’on propose à un âne un seau d’eau et un seau de vin, il boira l’eau, et c’est précisément en cela qu’il est un âne.

En Provence, la charge de la bête est appelée la sommée. Et tout naturellement, le sommelier désigne le conducteur de bêtes. Puis le mot se spécialise pour désigner l’officier chargé du transport des bagages dans les voyages de la Cour, puis celui en charge de la vaisselle, des provisions et de la cave… et enfin le monsieur vins que nous connaissons aujourd’hui. Le sommelier contrôle tout : chargement, déchargement, transvasement. Une vraie bête de somme !

Si dans certaines maisons, le sommelier était malheureusement considéré comme un simple manutentionnaire et un gestionnaire de stocks, les choses ont bien évolué et son statut s’est ennobli. Contrairement à une idée préconçue il n’est pas là nécessairement pour placer les bouteilles les plus onéreuses, mais pour vous conseiller. Aussi faites appel à lui. Écoutez-le, il deviendra le véritable complice de votre plaisir.

Et laissons la parole au poète. Raoul Ponchon, dans le Courrier Français du 25 février 1900 leur rendait hommage :

Que j’aime à voir autour de cette table
Des sommeliers, encor des sommeliers ;
Au monde il n’est rien de plus respectable
Qu’un sommelier, sinon deux sommeliers.

O sommeliers ! vous êtes tous des braves,
C’est bien certain, car ça n’est pas en vain
Que vous avez commerce avec les caves,
Que tous les jours vous fréquentez le vin.

Entre tous les métiers que l’on répute
Le vôtre, amis, est pour moi le premier ;
Si je n’étais simple joueur de flûte,
Je voudrais être un digne sommelier.

Parbleu ! les chefs ont bien leur importance
Pour un festin. Quant à moi, je m’en fous.
Non, non, les chefs, ils ne sont pas, je pense,
A beaucoup près importants comme vous.

C’est pour le mieux quand les deux vont ensemble.
Bonne chère et bon vin font amitié.
Mais un rata si bon qu’il soit, ce semble,
Mal arrosé, n’est-ce pas grande pitié ?

Ah ! donnez-moi pour toute nourriture
N’importe quoi, ne fût-ce qu’un pain sec,
Mais, nom de Dieu, d’un joli vin nature
Je veux au moins me barbouiller le bec.

Au temps jadis, quand les rois tenaient tables
Et qu’ils savaient boire comme des dieux,
Les sommeliers étaient grands connétables.
Et les celliers ne s’en portaient que mieux.

Les rois sont morts. Et notre République
Se meurt de soif, malgré son galoubet ;
Le moindre vin lui donne la colique.
Que voulez-vous qu’on boive chez Loubet ?

On voit aussi des médecins en vogue
Recommander à nos petits boyaux
De l’eau, du lait et d’autres sales drogues…
Est-il permis de pareils idiots ?…

La France, hélas ! deviendrait chose morte
S’il fallait croire en ces hurluberlus.
Zut pour leur eau, que leur eau les emporte !
Et nous, buvons du vin quatre fois plus.

Non, par Bacchus ! tant qu’elle aura des treilles,
La France encor vivra ; tant qu’elle aura
Des sommeliers pour les mettre en bouteilles
Et tel têtu gosier qui les boira.

Buvons nos vins jusqu’à ce qu’on en crève,
Le fin Bordeaux qui fleure le printemps,
Le Bourguignon en qui monte la sève,
Et le Champagne, excellent cure-dents.

Versez-nous-les toujours à pleine amphore,
O sommeliers ! Tous ces vins que voici.
Et puissiez-vous nous en verser encore
Et du meilleur dans cinquante ans d’ici.

Car quoi que puisse en penser le vulgaire,
Comme l’a dit si bien… Chose… Machin…
Le plus beau geste, à coup sûr, de la terre
C’est de verser à boire à son prochain.

Mon Dieu, parfois, en des cafés notables
Votre patron qui vous le dit tout bas,
Vous fait servir des choses discutables,
Dont, grâce à Dieu, vous, vous ne buvez pas…

Mais arrêtons ici ce radotage,
Je craindrais de vous causer de l’ennui.
Si j’ai parlé c’est pour vous rendre hommage
Et je remets ma lyre en son étui.

O sommeliers que le ciel accompagne,
Puisque aussi bien nous sommes au dessert,
Je bois à vous ce verre de Champagne
Qui plus que moi se montrera disert,

Le voyez-vous qui pétille et qui bouge ?
Il n’en est pas ainsi des milliers.
Vive donc le G.H. Mumm Cordon rouge !
Vive Jourdan et tous les sommeliers !

Rien à rajouter. Champagne !

Boude pas, c’est pas ton genre !

Pour bien préparer les fêtes !!

Mes petites chattes, le cri de détresse de Laurie Blethon m’a touchée. Pour partager le drame que vit cette pauvre petite, je vous mets un extrait de sa missive :

Ma chère Mona, je dois vous avouer que, bien que les fêtes de fin d’année ne soient point encore passées, j’ai déjà fait exploser ma balance… Si çà continue, je fais faire péter les boulons de mon pèse-personne. J’ai le fessier gonflé comme une montgolfière et mon tour de taille est proche de celui d’une pissotière à six places. Ma gourmandise m’a rattrapée et les douceurs qui ont glissé si vite dans ma bouche se sont durablement figées sur mes hanches. Mes cuisses sont pleines de peau d’oranges, ce qui me rend amère. N’étant pas fortiche pour suivre un régime Dukan ou d’autre camp d’ailleurs, je fais appel à vous, vous qui avez toujours une taille de guêpe sans qu’il vous manque quoique que ce soit pour remplir la main d’un honnête homme. Vous êtes mon dernier espoir, belle Mona… Gros baisers (une remarque, Laurie : quand vous écrivez « gros baisez« , c’est une faute d’orthographe)

Avouez que c’est poignant d’amour (si j’ose dire) ; et mon cœur tendre est prêt à fondre comme une plaque de beurre sur une gazinière ; je ne pouvais rester insensible. Vous savez mes petites sœurs que Tata Mona ne vous laissera jamais tomber (et vous en abusez même des fois). Aussi j’ai cherché à vous sortir de cette mauvaise passe : vous n’envisagez pas ma chère Laurie Blethon de suivre un régime (ni de le précéder). Aussi, il vous reste à accepter votre nouvelle silhouette et vous dire que chaque bocal peut trouver son couvercle. Pour illustrer mon propos, je fais appel à un auteur du XIX° siècle, Octave Uzanne. Dans le bric-à-brac de l’amour, il écrit :

T’ai-je parlé de la Dame en question ?
Point ne crois. Femme du monde, catégorie des Célimènes.
Très jolie pour ceux qui ont la rétine conformée a la Rubens, un peu lourde pour les raffinés qui voient comme Boucher et Fragonnard. Grande, brune, forte, des yeux bruns, fiers et polissons à la fois, la bouche de tout le monde et le nez de personne. Pour le corps, une Fornarina; des épaules, des bras, un cou, des hanches à ravager un bal de sous-préfecture. Tu vois cela d’ici.

Vous voyez Laurie, toute chaussure peut trouver un pied qui l’aimera même quand c’est un bon 51 fillette. Gardez espoir, il existe sans aucun doute cet amateur de Rubens ou de Botero qui s’extasiera devant vos formes plantureuses, débordantes et gélatineuses. Mais, à l’approche des réveillons, il vous faudra être raisonnable, faute de quoi, c’est un éleveur de percheron ou pis un dresseur de pachydermes que vous devrez chercher dès le lendemain des fêtes. 

Mona pas pris un gramme en lisant la bafouille de Laurie…

Il a fini par nourrir

En cette fin d’année 1878, les héritiers de Félix Durijot sont réunis chez le notaire pour écouter le testament qu’il y a déposé. Et, l’homme était riche. Propriétaire de restaurants à Paris dont le célèbre Frères Provençaux, il avait gagné pas mal d’argent qu’il avait placé avec grand profit à la Bourse. Aussi, les descendants du cuisinier sont attentifs.  
Le notaire décachète l’enveloppe et commence la lecture :

Voulant être utile après ma mort à mes compatriotes, et trouvant que les épitaphes où sont célébrées les vertus du défunt ne servent à rien, j’ordonne que la mienne soit remplacée, sur mon monument funèbre, par un cadre en bronze couvert d’un grillage et fixé en haut d’une colonne de marbre qui portera simplement mon nom.
Chaque jour, par les soins de mes héritiers, une recette de cuisine, très lisiblement écrite, sera glissée dans la rainure du cadre. J’en laisse à cet effet trois cent soixante-cinq, que l’on trouvera dans ma caisse.
Au bout d’un an, on recommencera, et ainsi de suite.
Comme cela, tout en allant visiter les morts, les personnes désireuses de s’instruire pourront rapporter du cimetière d’utiles renseignements. En cas de non-exécution de cette clause par mes héritiers, ma fortune tout entière reviendra à l’Assistance publique.
Ecrit de ma main et signé par moi-même, à Paris, en mon domicile 4, rue des Moines, le 6 avril 1878, étant sain de corps et d’esprit.

Un silence de mort (si j’ose dire) plane sur l’étude notariale.
L’un s’adresse à l’officier public :

-Mais enfin Maître, il était devenu fou ! Nous habitons à plus de 400 km de la capitale et il nous sera impossible de changer le menu chaque jour.
-Possible, mon Cher, mais la rédaction du testament est claire (de notaire, ah, ah…).

Heureusement, les héritiers pour s’assurer le magot se tournent vers l’administration qui rejette la volonté du défunt. Ouf !

Les 365 menus concoctés par le grand chef ne furent jamais affichés au cimetière ; pis, ils ne furent jamais publiés.

Mona préparé 365 articles pour l’au-delà. Mais, comme Francis Blanche, elle préfère le vin d’ici à l’au-delà. 

Un bijoutier pèse ses broches

La Régence est une époque restée célèbre pour une altération sensible des mœurs, comme on disait à l’époque. Après que Madame de Maintenon ait rendu le vieux roi Louis XIV dévot et pieux, le Régent Philippe D’Orléans bascula la Cour dans la débauche…

Madame Charlotte de Bavière, la Palatine, dit, en parlant de l’inclination du duc d’Orléans pour les femmes : «Un autre défaut de mon fils est d’avoir trop de goût pour les femmes, ce qui lui fait souvent des querelles dans sa maison. Autrefois, ajoute-t-elle, il avait la taille jolie; mais à présent il épaissit trop, car il est très petit (il avait quarante-deux ans lorsque Madame écrivait). Malgré sa laideur, toutes les femmes le courent; l’intérêt les attire ; il les paie bien.»

Elle raconte à ce propos une anecdote plaisante arrivée au duc d’Orléans; une jeune femme fort aimable vint le trouver dans son cabinet; après en avoir eu les faveurs, il lui donna un diamant de deux mille louis et une boite de deux cents louis. La belle avait un mari jaloux, et ne sut d’abord comment lui montrer ce présent ; mais enfin elle s’avisa d’une ruse. Elle eut l’effronterie de lui dire qu’il y avait des gens qui, dans un besoin pressant d’argent, lui faisaient offrir un bijou à très-bon marché, quelle le priait de ne pas laisser échapper cette occasion. Le mari la crut, et compta à sa femme l’argent qu’elle demandait. Elle prit l’argent, mit la boite dans sa poche et la bague à son doigt, et s’en alla dans une grande compagnie. On voulut savoir d’où venaient ces bijoux.
-Mon mari me les a donnés, dit-elle
Il était présent, et dit :
-Oui, je lui ai fait ce cadeau ; peut-on faire moins pour une femme de qualité qui n’aime uniquement que son mari ?
Cela fit rire toute la compagnie, qui n’était pas dupe, et le mari seul ignorait où elle avait été vendanger.

Bon Mona, que diriez-vous d’un vin sarde ? Mamuthone 2009 est vinifié à partir du cépage Cannonau Mamoiadas (Grenache). Les vieilles vignes donnent un grand vin aux arômes de fruits noirs et rouges. Cà donne envie d’aller en Sardaigne…

Et dites cresson…

Décidément, vous me prenez pour une encyclopédie sur pattes. Les questions fusent à la vitesse d’un pet sur une toile cirée. Vous attendez, espérez tout de moi. Même, si je dois vous l’avouer, à la lecture de vos lettres, l’émotion mes trains (je m’égare !), je sens sur mes frêles épaules une responsabilité qui m’écrase : serais-je à la hauteur des espérances que vous placez en moi ?

Bon Mona, faut te reprendre et répondre au courrier de Laurent Houtant qui constate avec angoisse que ses cheveux tombent. Il souhaite un traitement pour enrailler (ah, ah, ah) enrayer la chute.

Laurent, t’es tombé pile poil. Car je dois vous l’avouer, Lépicurien, mon adorable patron a le crane fortement dégazonné. On peut dire qu’il a une tête en peau de fesses, un aéroport à mouches, une casquette en œuf de Pâques, un manque de chapelure sur le jambonneau ; que son crane ressemble à une boulle de billard, à un genou, un tabouret dépaillé, à une pomme d’escalier fraichement lustrée. Je pense que vous avez compris, le grand homme n’a plus de gazon sur le caillou. Quand je l’ai connu, il était déjà comme çà. Dans cet état, il est trop tard. Pour masquer les dégâts, l’absence, il faut se diriger vers la moquette, le gazon artificiel autrement dit la perruque.

Pour toi, Laurent, qui a eu la délicatesse de m’envoyer ta bobine sur papier glacé, on doit pouvoir sauver ou au moins retarder le départ de tes douilles. Ceci étant dit, je te conseille quand même d’ouvrir un livret qui te servira un jour ou l’autre à investir dans une moumoute sur mesure.

Pour ce, il faudra manger environ 85g de cresson par jour. Ce crucifère de la famille des brassicacées (je mets çà pour vous montrer le sérieux de mes études) a des propriétés connues depuis la haute antiquité et son absorption régulière apporte plein de bonnes choses à notre organisme. Non seulement tu verras tes tifs rester sur ton ciboulot, mais tu sentiras une tonicité exceptionnelle, ton appétit se développera, tu iras mouiller le mur plus souvent. Et selon des études récentes, le cresson serait bon pour prévenir du cancer et spécialement du poumon. Même si je ne vous encourage pas à cramer des sèches, un fumeur a tout intérêt à béqueter du cresson à en devenir herbivore.

Donc pratiquement, Laurent, tu remplaces dans ta vinaigrette la laitue par le cresson, tu t’en fais des potages, du jus et tu pourras encore utiliser ton piège à poux pour ratisser ta tignasse. C’est tout ce que je te souhaite.

Par contre quand Lépicurien me demande des nouvelles de ma cressonnière, je ne suis pas sure qu’il parle salade ou alors c’est la petite salade aux lardons. Au fait, il faut que je vous dise que le cresson fut considéré comme aphrodisiaque. J’aurais pas dû en donner au boss.

Mona plaisir à entretenir son cresson.