Toujours absinthe de nos bars ? Pas pour longtemps

La Fée Verte est de retour

Dans les pages saumon du Figaro du 14 août, fut édité un court article annonçant qu’à dater de 2011, la production d’absinthe « à l’ancienne » sera autorisée en France. Bien entendu, ce n’est plus stratégique pour le groupe Pernod-Ricard. La consommation mondiale n’est que de 2,7 millions par an… alors qu’en 1900, en France uniquement, on en buvait 36 millions de litres.

Mais, symboliquement, c’est important. En effet, accusée de tous les maux, la Fée Verte a été interdite en 1915.

Baudelaire, Verlaine, Modigliani, Toulouse-Lautrec, Van Gogh … en avaient fait leur muse. Et Dieu sait qu’ils en avaient de l’inspiration, les bougres.

Mais, dès le début du 20e siècle, l’absinthe devint le symbole de l’alcoolisme. Une campagne, relayée par les producteurs de vins qui voyaient là l’occasion d’éliminer un gros concurrent, est lancée. Les  ligues antialcooliques présentent l’absinthe comme l’origine de tous les problèmes : hausse de la criminalité, de la tuberculose, de la violence conjugale, de l’aliénation et baisse de la natalité…

Pour arriver à leur fin, les autorités emploient un argument massue : l’absinthe contient à haute dose une molécule[1] qui peut rendre aveugle ou fou et qui augmente le risque de tuberculose. Et puis, on inocula de fortes potions à base d’absinthe à de pauvres bêtes qui tombèrent foudroyées[2]. N’en jetez plus.

Ainsi, les soldats de la Grande Guerre ne boiront plus de verte, ils boiront du rouge… La France est sauvée.

Mais saviez-vous que depuis 1988, la production et la vente est autorisée sous le nom de spiritueux aux plantes d’absinthes. Simplement, la fenchone[3] et la pino-camphone[4] seront autorisées en France dès l’année prochaine.

Ceci va permettre à nos producteurs d’être à égalité avec les distillateurs étrangers.

Mais le plus sympa, c’est qu’un nombre d’objets plus présents dans les musées que dans les bars pourraient revivre : verres, carafes, cuillers et brouille-absinthe.

Et comme toujours, bue avec modération, la Fée Verte est un élément de notre patrimoine qui doit retrouver une place qu’elle n’aurait jamais due perdre.

N’ayant pas d’absinthe sous la main, exceptionnellement, ma Chère Mona, nous ne boirons pas. Ce n’est que partie remise. Allez donc laver les verres. En attendant, regardez donc la cérémonie de l’absinthe :



[1] La thuyone : les scientifiques du XIXe siècle en avaient trouvé 260 mg/l. Récemment, des analyses ont démontré qu’il n’y en avait que 20 mg… Tout le monde peut se tromper.

[2] Un député qui était contre le texte dit à la tribune de l’assemblée : « que des chiens meurent après avoir absorbé de l’absinthe ne démontre qu’une chose : l’absinthe, c’est pas fait pour les chiens ».

[3] Molécule issue du fenouil

[4] Issue de la macération de l’hysope qui donne la fameuse couleur verte à l’élixir