C’est pas à Tristan

Tristan Bernard est un auteur à l’humour ravageur. Il a laissé un grand nombre de mots d’esprit dont, par exemple :

-L’argent n’a pas d’odeur, mais à partir d’un million il commence à se faire sentir.

Pour profiter de cet humour, Tristan Bernard était souvent invité dans des salons bourgeois avec d’autres écrivains, acteurs, musiciens.
Un jour, il fut convié par une maîtresse de maison, bourgeoise réputée pour sa pingrerie. Après que chaque hôte remplît le rôle qu’on attendait de lui, une soubrette amena une assiette sur laquelle étaient posés des babas au rhum, coupés en deux.
Tristan, amusé par un tel étalage d’avarice, posa la main sur une moitié de gâteau, resta ainsi et dit suffisamment fort pour que chacun profite de son bon mot :

-Ah, merci, je crois que je vais me laisser tenter par un ba.

Mona mangé un baba entier, elle. C’est bon.

ah, Tristan

Tristan Bernard fut un des écrivains les plus drôles de la fin des années 1880 à 1947 et ce non seulement dans ses écrits mais également dans sa vie ce qui le priva notamment d’entrer à l’Académie Française. Sacha Guitry relate sa candidature :
« Lorsque Tristan Bernard s’est présenté à l’Académie Française, cette candidature a été accueillie dans le monde des lettres et par le public avec la plus charmante sympathie – mais peu de gens l’ont prise au sérieux. Il obtint deux voix sur trente-neuf votants et personne ne s’en étonna. Non. Personne ne fut surpris ni qu’il n’eût que deux voix, ni qu’il eût deux voix. Pourquoi trouve-t-on cela naturel ? Parce que Tristan Bernard est un auteur gai, dont on dit qu’il est humoriste. »

Un journaliste lui demanda s’il espérait être élu un jour. Il répondit :
« Le costume est très cher, mais il parait qu’on revend les costumes des défunts. J’attendrai qu’il en meure un de ma taille. »

Durant l’occupation, il disait :
 » Comme c’est triste d’avoir si peu d’occupation dans un pays si occupé. »
Mais d’origine juive, il fut arrêté et transféré à Drancy, ce qui ne le priva pas d’un bon mot.
De quoi as-tu besoin ?, lui demanda-t-on au moment du départ.
D’un cache-nez.
L’intervention de Sacha Guitry et d’Arletty lui rendit heureusement sa liberté.

Mona beaucoup ri en relisant : « La Vénus callipyge avait un bel avenir derrière elle. »