Ah, rends-moi mon poisson

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La guerre de cent ans a duré évidemment un bail et à l’époque, on aimait bien encercler les villes pour affamer les habitants et les contraindre à se rendre. En 1428, les Anglais font ainsi le siège d’Orléans. Il faudra que Jeanne d’Arc vienne en 1429 pour que la ville s’en sorte. Pour soutenir la population assiégée, les pêcheurs normands expédient des tonnes de harengs, poissons gras fort nourrissants. Mais un convoi parti au cours d’un hiver particulièrement froid, est pris dans une grosse tempête de neige. Les hommes décident de s’arrêter plusieurs jours à Lieurey qui est situé à 35 km de la mer. Dans cette paroisse de l’Eure, ils vendent leur cargaison aux plus offrants pour ne pas tout perdre.

Comme toujours on ne sait si c’est un fait ou une légende. Toujours est-il que depuis le Moyen-âge, chaque année a lieu en ce jour de la Saint-Martin, la foire aux harengs de Lieuré (Eure). On y vend des tonnes de poissons, on en grille et un concours du plus gros mangeur de harengs est organisé. Le vainqueur est celui qui en engloutira le plus en une heure. Pour espérer décrocher le titre, je vous informe qu’il faut ingurgiter environ 1.5 kg de poiscaille…

Ma chère Mona, vous allez me demander pourquoi je parle aujourd’hui de cette fête qui ne se déroulera qu’en novembre. Et bien parce que je vous ai inscrite et que ces dix mois ne seront pas de trop pour vous entraîner. L’honneur de notre journal est en jeu. Aussi, je vous ai amené quelques harengs que j’accompagnerai d’un vin blanc du Vendômois. Le domaine de Patrice Colin offre un vin 2010 tendu, minéral qui vous aidera à digérer votre pitance maritime. Allez Mona, top départ… Et puis du Colin sur du hareng, ça doit le faire !

Cep possible

Jusqu’au XVIII° siècle, le vignoble francilien était le plus important de France avec ses 42 000 ha plantés. Le phylloxéra, l’urbanisation et la facilité d’accès aux vignobles de « meilleure qualité » (Loire, Bourgogne, Bordeaux…) eurent raison de la vigne. Après avoir fourni la cour royale, les derniers pieds furent arrachés au milieu du XX° siècle.

Depuis quelques années, on replante en Ile de France. Ce sont les vignes de Montmartre qui restent les plus connues. Mais c’est à Argenteuil, Suresnes que l’on plante.

Le vin de Suresnes eut pendant longtemps une réputation extraordinaire. Cette célébrité remonte au XVII° siècle.

Alexandre Dumas estime que cette renommée est due à une confusion : Henri IV appréciait particulièrement un vin du Vendômois issu d’un cépage du nom de Suren. Le Roi aimant, toute la Cour en but et la renommée du Suren était établie. Par contre, Louis XIII, fils d’Henri, n’eut pas le même penchant pour ce vin. Le Suren tomba dans l’oubli.

Quelques décennies plus tard, on prêta à Suresnes ce qui appartenait à Suren…

Savez vous, ma chère Mona, que le vin de Suresnes est à ce jour le seul « parisien » à être commercialisé. Dommage, je n’en ai pas sous la main. Mais je vous invite à tester un vin de Chateaumeillant. Cette petite appellation au sud de Bourges produit des vins plutôt légers mais fruités à souhait. Le Domaine du Chaillot 2008 est une invitation au printemps.