C’est chimique ta mère

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Un certain nombre d’affaires ont secoué l’industrie alimentaire ces temps-ci. Les additifs ont envahi nos assiettes. Les restaurateurs cuisinent  de moins en moins, les pains congelés fleurissent dans les grandes surfaces et ailleurs. Certains confondent viande de cheval et de bœuf ; les fromages dénaturés sont sans saveur et sans odeur, les OGM et pesticides dominent le monde agricole…
Nous sommes nombreux à considérer que trop d’aliments industriels ne sont que des produits à forte marge sans souci de grande qualité et de la santé des consommateurs.
Et pourtant, l’homme en rêvait de cette révolution industrielle. Ainsi Marcellin Berthelot, chimiste de la fin du XIX° siècle, prononça un discours devant la Chambre syndicale des produits chimiques en avril 1894. Pour lui, la chimie devait résoudre le problème de l’alimentation en l’an 2000. Nous qui sommes de ce millénaire déchantons un peu…

C’est là que nous trouverons la solution économique du plus grand problème peut-être qui relève de la chimie, celui de la fabrication des produits alimentaires. En principe, il est déjà résolu ; la synthèse des graisses et des huiles est réalisée depuis quarante ans, celle des sucres et des hydrates de carbone s’accomplit de nos jours, et la synthèse des corps azotés n’est pas loin de nous. Ainsi le problème des aliments, ne l’oublions pas, est un problème chimique. Le jour où l’énergie sera obtenue économiquement, on ne tardera guère à fabriquer des aliments de toutes pièces, avec le carbone emprunté à l’acide carbonique, avec l’hydrogène pris à l’eau, avec l’azote et l’oxygène tirés de l’atmosphère.

Ce que les végétaux ont fait jusqu’à présent, à l’aide de l’énergie empruntée à l’univers ambiant, nous l’accomplissons déjà et nous l’accomplirons bien mieux, d’une façon plus étendue et plus parfaite que ne le fait la nature car telle est la puissance de la synthèse chimique.

Un jour viendra où chacun emportera pour se nourrir sa petite tablette azotée, sa petite motte de matière grasse, son petit morceau de fécule ou de sucre, son petit flacon d’épices aromatiques, accommodés à son goût personnel ; tout cela fabriqué économiquement et en quantités inépuisables par nos usines; tout cela indépendant des saisons irrégulières, de la pluie, ou de la sécheresse, de la chaleur qui dessèche les plantes, ou de la gelée qui détruit l’espoir de la fructification; tout cela enfin exempt de ces microbes pathogènes, origine des épidémies et ennemis de la vie humaine.

Ce jour-là, la chimie aura accompli dans le monde une révolution radicale, dont personne ne peut calculer la portée; il n’y aura plus ni champs couverts de moissons, ni vignobles, ni prairies remplies de bestiaux. L’homme gagnera en douceur et en moralité, parce qu’il cessera de vivre par le carnage et la destruction des créatures vivantes. Il n’y aura plus de distinction entre les régions fertiles et les régions stériles. Peut-être même que les déserts de sable deviendront le séjour de prédilection des civilisations humaines, .parce qu’ils seront plus salubres que ces alluvions .empestées et ces plaines marécageuses, engraissées de putréfaction, qui sont aujourd’hui les sièges de notre agriculture.

Dans cet empire universel de la force chimique, ne croyez pas que l’art, la beauté, le charme de la vie humaine soient destinés à disparaître. Si la surface terrestre cesse d’être utilisée, comme aujourd’hui, et disons le tout bas, défigurée, parles travaux géométriques de l’agriculteur, elle se recouvrira alors  de verdure, de bois, de fleurs ; la terre deviendra un vaste jardin, arrosé par l’effusion des eaux souterraines, et où la race humaine vivra dans l’abondance et dans la joie du légendaire âge d’or.

Mona, heureusement il reste des vignobles et je vous invite, si vous voulez bien sortir deux verres à déguster un vin de glace canadien. Le Château des Charmes 2000 est à base d’un hybride, le Vidal. Un nez de mangue, une longueur en bouche exceptionnelle. Une vin tellement gourmand que c’est un dessert à lui tout seul.